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PREMIÈRE PARTIE 20 страница



– M'en parle pas des gamins d'aujourd'hui… C'est pas difficile, on ne peut plus rien leur dire… Y boudent. Y savent faire que ç a: bouder. Ç a me fatigue, tiens… Ç a me fatigue plus que vous quand vous aviez mis le feu aux poubelles…

– C'est vrai! Je m'en souvenais plus du tout…

– Ben moi, je m'en souviens, je te prie de me croire!

La lumiè re s'é teignit. Camille souffla ses bougies et toute la salle applaudit.

Philibert s'é clipsa et revint avec un gros paquet:

– C'est de notre part à tous les deux…

– Ouais, mais son idé e, pré cisa Franck. Si ç a te plaî t pas, je suis pas responsable. Moi je voulais te louer un strip-teaseur, mais il a pas voulu…

– Oh, merci! C'est gentil!

C é tait une table d'aquarelliste dite «de campagne».

Philibert lut le papier avec des tré molos dans la gorge:

– Pliante et inclinable à double plateau, stable, avec une grande surface de travail et deux tiroirs de range-

ment. Elle est é tudié e pour travailler assis. Elle est composé e de quatre pieds, on est content… en hê tre repliables assemblé sdeux à deux par une traverse donnant ouverte une grande stabilité. Fermé s ils assurent le blocage des tiroirs. Plateau inclinable grâ ce à une double cré maillè re. Il est possible de ranger un bloc de papier de format maxi 68X 52 cm. Il y a dé jà quelques feuilles au cas où … Unepoigné e inté gré e permet le transport de l'ensemble replié. Et ce n'est pas fini, Camille… un emplacement pour une petite bouteille d'eau est pré vu sous la poigné e!

– On peut mettre que de l'eau? s'inquié ta Franck.

– Mais ce n'est pas pour boire, idiot, se moqua Paulette, c'est pour mé langer les couleurs!

– Ah ben ouais, je suis con, moi…

– Ç a… Ç a, te plaî t? s'inquié ta Philibert.

– C'est magnifique!

– Tu… tu pré … pré fé rais pas un ga… un garç on tout nu?

– J'ai le temps de l'essayer tout de suite?

– Vas-y, vas-y, on attend René de toute faç on…

Camille chercha sa minuscule boî te d'aquarelles dans son sac, desserra les vis et s'installa devant la baie vitré e.

Elle dessina la Loire. Lente, large, calme, imperturbable. Ses bancs de sable nonchalants, ses piquets et ses barques moisies. Un cormoran là -bas. Les joncs pâ les et le bleu du ciel. Un bleu d'hiver, mé tallique, é clatant, frimeur, cabotinant entre deux gros nuages fatigué s.

Odette é tait hypnotisé e:

– Mais comment qu'elle fait? Elle n'a que huit couleurs dans son petit machin!

– Je triche mais chut… Tenez. C'est pour vous.

– Oh, ben merci! Merci! René! Viens voir par ici!

– Je vous offre le repas, moi!

– Oh, mais non…

– Mais si, mais si! J'y tiens…

Quand elle se rassit avec eux, Paulette lui glissa un paquet sous la table: c'é tait un bonnet assorti à l'é charpe. Les mê mes trous et les mê mes couleurs. La classe.

Des chasseurs arrivè rent, Franck les suivit en cuisine avec le maî tre de maison et l'on tira sur la fine en commentant les gibeciè res. Camille s'amusait avec son cadeau et Paulette racontait sa guerre à Philibert qui avait allongé ses longues jambes et l'é coutait passionné ment.

Puis ce fut la mauvaise heure, entre chien et loup, et Paulette s'assit à la place du mort.

Personne ne parlait.

Le paysage devint de plus en plus laid.

Ils contournè rent la ville et traversè rent des zones commerciales sans surprise: le supermarché, les hô tels à 29 euros avec le câ ble, les hangars et les garde-meubles. Enfin Franck se gara.

Tout au bout de la zone.

Philibert se leva pour lui ouvrir la porte et Camille retira son bonnet.

Paulette lui caressa la joue.

– Allez, allez… bougonna Franck, on abrè ge. J'ai pas envie de me faire engueuler par la mè re sup, moi!

Quand il revint, la silhouette avait dé jà é carté les voilages.

Il se rassit, grimaç a et souffla un bon coup avant a embrayer.

H n é tait pas encore sorti du parking que Camille lui tapa sur l'é paule:

– Arrê te-toi.

– Qu'est-ce que t'as oublié encore?

– Arrê te-toi, je te dis.


18


Il se retourna.

– Et maintenant?

– Combien ç a vous coû te?

– Pardon?

– Ce truc, là? Cette maison?

– Pourquoi tu me demandes ç a?

– Combien?

– Dans les dix mille balles…

– Qui paye?

– La retraite de mon pé pé, sept mille cent douze francs et le Conseil gé né ral ou je ne sais plus quoi…

– Pour moi je te demande deux mille balles comme argent de poche et le reste, tu te le gardes et t'arrê tes de travailler le dimanche pour me soulager…

– Attends, de quoi tu me parles, là?

– Philou?

– Ah non, c'est ton idé e, ma chè re, minauda-t-il.

– Oui, mais c'est ta maison, mon ami…

– Hé! Qu'est-ce qui se passe, là? C'est quoi l'embrouille?

Philibert alluma le plafonnier:

– Si tu veux…

– Et si elle, elle veut, pré cisa Camille.

– … on l'emmè ne avec nous, sourit Philibert.

– A… avec vous, où? bredouilla Franck.

– Chez nous… à la maison…

– Quand… quand ç a?

– Maintenant.

– Main… maintenant?

– Dis-moi, Camille, j'ai l'air aussi ahuri que ç a quand je bé gaye?

– Non, non, le rassura-t-elle, tu n'as pas du tout ce regard idiot…

– Et qui c'est qui va s'en occuper?

– Moi. Mais je viens de te soumettre mes conditions…

– Et ton boulot?

– Plus de boulot! Fini!

– Mais euh…

– Quoi?

– Ses mé dicaments et tout ç a…

– Ben je lui donnerai! C'est pas dur de compter des pilules, si?

– Et si elle tombe?

– Ben elle tombera pas puisque je suis là!

– Mais euh… Elle… elle dormira où?

– Je lui laisse ma chambre. Tout est pré vu…

Il posa son front sur le volant.

– Et toi Philou, qu'est-ce que t'en penses?

– Du mal au dé but et puis du bien. Je pense que ta vie sera beaucoup plus simple si on l'emmè ne…

– Mais c'est lourd un vieux!

– Tu crois? Combien elle pè se ta petite grand-mè re? Cinquante kilos? Mê me pas…

– On peut pas l'enlever comme ç a?

– Ah bon?

– Ben non…

– S il faut payer des dommages, on payera…

– Je peux faire un tour?

– Vas-y.

– Tu m'en roules une, Camille?

– Tiens.

Il claqua la porte.

– C'est une connerie, conclut-il en revenant s'asseoir.

– Ç a, on n'a jamais dit le contraire… Hein Philou?

– Jamais. On est lucides quand mê me!

– Ç a vous fait pas peur?

– Non.

– On en a vu d'autres, pas vrai?

– Oh là!

– Vous croyez qu'elle va se plaire à Paris?

– On ne l'emmè ne pas à Paris, on l'emmè ne chez nous!

– On lui montrera la tour Eiffel!

– Non. On lui montrera plein de choses beaucoup plus belles que la tour Eiffel…

Il soupira.

– Bon, ben, on fait comment maintenant?

– Je m'en occupe, dit Camille.

Quand ils revinrent se garer sous ses fenê tres, é tait toujours là.

Camille partit en courant. Depuis la voiture, Franck et Philibert assistè rent à un numé ro d'ombres chinoises: petite silhouette se retournant, silhouette plus grande à ses cô té s, gestes, hochements de tê te, mouvements d'é paules, Franck ne cessait de ré pé ter: «C'est une connerie, c'est une connerie, je vous dis que c'est une connerie… Une é norme connerie…»

Philibert souriait.

Les silhouettes changè rent de place.

– Philou?

– Mmm…

– C'est quoi cette fille?

– Pardon?

– Cette fille, que tu nous as trouvé e, là … C'est exactement? Un extraterrestre?

Philibert souriait.

– Une fé e…

– Ouais, c'est ç a… Une fé e… T'as raison.

Et… euh… Elles… elles ont une sexualité, les fé es ou euh…

– Mais qu'est-ce qu'elles foutent, merde?

La lumiè re s'é teignit enfin.

Camille ouvrit la fenê tre et balanç a une grosse valise par-dessus bord. Franck, qui é tait en train de se manger les doigts, sursauta:

– Putain, mais c'est une manie chez elle de jeter les trucs par la fenê tre ou quoi?

Il riait. Il pleurait.

– Putain, mon Philou… de grosses larmes coulaient sur ses joues, ç a faisait des mois que j'arrivais plus à me regarder dans une glace… T'y crois à ç a? Putain, t'y crois? tremblait-il.

Philibert lui tendit son mouchoir.

– Tout va bien. Tout va bien. On va te la chouchouter, nous… T'inquiè te pas…

Franck se moucha et avanç a la voiture, il se pré cipita vers les filles pendant que Philibert ré cupé rait la valise.

– Non, non, restez devant jeune homme! Vous avez des grandes jambes, vous…

Silence de mort pendant quelques kilomè tres. Chacun se demandant s'il ne venait pas de faire une é norme bê tise justement… Puis, tout à coup, ingé nue, Paulette chassa les nué es:

– Dites… Vous m'emmè nerez au spectacle? On ira voir des opé rettes?

Philibert se retourna en chantonnant: «Je souis Bré silien, jé de l'ol, Etj'allive dé Rio Janè l, Plous liche aujould'houi qué naguel, Palis, Palis, je té lé viens encol! »

Camille lui prit la main et Franck sourit à Camille dans le ré troviseur.

Nous quatre, ici, maintenant, dans cette Clio pourrie, libé ré s, ensemble, et que vogue la galè re…

Tou cé que là -baaas jé é é volé é é é é é! reprirent-ils tous en chœ ur.

 


 

 



  

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