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DEUXIÈME PARTIE 20 страница
À cô té de ce cas franç ais, l’Amé rique reprend l’avantage avec de trè s remarquables é tudes. Une des plus curieuse observations dont malheureusement je ne puis guè re appré cier la valeur scientifique, est celle qui a é té publié e en 1894 avec ce titre assez bizarre: Mollie Fancher, the Brooklyn enigma, an authentic statement of facts in the life of Mary J. Fancher, the psychological marvel of the nineteenth century, unimpeachable testimony by many witnesses, by Abraham H. Daily, 1894. L’histoire est singuliè rement raconté e: on y sent une sorte d’admiration mystique pour le sujet, une recherche exagé ré e de phé nomè nes surprenants et supranormaux qui é videmment inspire quelque crainte sur la faç on dont l’observation a é té conduit. Mais il n’en reste pas moins bien des faits trè s remarquables et trè s inté ressants. Mollie Fancher, qui semble avoir eu tous les accident hysté riques possibles, des attaques, des contractures terribles durant de longues anné es, de la cé cité plus ou moins complè te, etc., a surtout pré senté toutes les formes du somnambulisme, depuis les plus simples jusqu’aux plus compliqué es. Il y a en elle au moins cinq personnes qui ont des petits nom trè s poé tiques: Sunbeam, Idol, Rosebud, Pearl, Ruby, chacune avec ses souvenirs et son caractè re, la complication de ce cas est fort amusante.
Enfin il nous reste à signaler en Amé rique la derniè re et la plus remarquable des observations de ce genre, l’observation de Miss Beauchamp par M. le Dr Morton Prince, un des mé decins de Boston qui se sont le plus inté ressé s au dé veloppement de la psychologie pathologique et qui a consacré des anné es de travail à l’observation de ce cas compliqué et inté ressant. Je ne puis entrer ici dans l’analyse de ces cas complexes qui ne sont d’ailleurs que des combinaisons et des formes varié es des deux formes simples pré cé dentes. Dans ces cas complexes survient d’ordinaire une nouvelle influence dont il faut se dé fier car elle complique fort les choses. Je veux parler de l’influence de l’observateur lui-mê me, qui finit par trop bien connaî tre son sujet et par ê tre trop bien connu de lui. Quelles que soient les pré cautions que l’on prenne, les idé es de l’observateur finissent par influer sur le somnambulisme du sujet et par lui donner souvent une complication artificielle. Quoi qu’il en soit, on doit ajouter l’é tude de ces cas complexes aux deux formes simples que nous avons signalé es pour comprendre tout le dé veloppement que peut prendre ce singulier phé nomè ne du dé doublement de la personnalité chez les hysté riques.
Pour interpré ter ces singuliers phé nomè nes, je voudrais ajouter ici une de mes propres observations qui ne diffè re des pré cé dentes que par un petit dé tail singulier, c’est que la double existence a é té en grande partie produite artificiellement. En 1887, une jeune femme de vingt ans, que j’ai souvent dé crite dans d’autres ouvrages sous le nom de Marcelline, entra à l’hô pital dans un é tat lamentable. À la suite d’anorexie hysté rique et de vomissements incoercibles, elle é tait depuis plusieurs mois ré duite à l’inanition complè te; en outre elle n’avait plus aucune fonction d’é vacuation et é tait incapable d’uriner spontané ment. Il faillait la sonder pour retirer quelques gouttes d’urine. Incapable de se tenir debout, complè tement insensible sur toute le surface de la peau et sur toutes les muqueuses, elle entendait trè s mal, voyait extrê mement peu et restait constamment dans une sorte d’é tat d’abrutissement. Ne parvenant pas à l’alimenter autrement, on a é té amené à essayer l’effet des pratiques hypnotiques: aprè s quelques tentatives, il fut facile de la faire entrer dans un é tat singulier qui paraissait momentané et artificiel, mais qui diffé rait tout à fait de son é tat habituel. Elle é tait devenue capable de se mouvoir, elle acceptait toute nourriture, n’avait plus aucun vomissement et urinait spontané ment, sans difficulté. D’autre part elle é tait devenue sensible sur tout le corps, entendait et voyait parfaitement, elle s’exprimait beaucoup mieux, avec plus de vivacité et montrait une mé moire de toute sa vie anté rieure.
Aprè s l’avoir alimenté e dans ce nouvel é tat, on crut né cessaire de la ré veiller et elle retomba immé diatement dans sa maladie pré cé dente. Inerte, insensible, incapable de s’alimenter ou d’uriner, elle pré sentait simplement un trouble de plus, c’est qu’elle avait tout à fait oublié ce qui s’é tait passé pendant la pé riode pré cé dente. Né anmoins, grâ ce à ces somnambulismes artificiels, on put trè s facilement l’alimenter et lui faire reprendre ses forces. Mais il fut toujours impossible de l’amener à se nourrir dans la pé riode considé ré e comme normale qui ré apparaissait toujours aprè s le ré veil. Si bien qu’on se fatigua de l’endormir ainsi à chaque repas, ce qui é tait fort long, et qu’on la laissa des journé es entiè res dans l’é tat artificiel. Il n’en ré sultait en apparence qu’un grand bien, puisque pendant toute la journé e elle mangeait et urinait, pré sentait une sensibilité, une activité et une mé moire beaucoup plus complè tes. Un jour ses parents la trouvant dans ce bel é tat artificiel la considé rè rent comme gué rie et la sortirent de l’hô pital.
Tout alla bien pendant les premiers jours; mais aprè s quelques semaines, à l’occasion de rè gles, elle ressentit une sorte de bouleversement et se ré veilla spontané ment. C’est-à -dire qu’elle rentra dans l’é tat de dé pression d’abrutissement d’où elle avait é té tiré e, mais en pré sentant en plus un oubli portant cette fois sur des semaines entiè res. Elle fut trè s troublé e de se retrouver chez elle sans comprendre comment elle avait quitté l’hô pital et elle recommenç a à ne plus pouvoir manger. Marcelline me fut amené e à ce moment et, en pré sence de tous ses troubles, je n’ai pu faire autre chose que de l’endormir de nouveau ou plutô t de la ramener dans son é tat supé rieur mais artificiel. Eh bien, les choses ont continué à se passer ainsi pendant quinze ans: Marcelline continua à venir de temps en temps se faire endormir, elle entrait alors dans son é tat alerte et partait trè s heureuse avec une activité, une sensibilité et une mé moire complè tes. Elles restait ainsi pendant quelques semaines, puis lentement ou subitement, à la suite de quelque é motion, elle retombait dans ses engourdissements, revenait à l’é tat que nous avions considé ré comme primitif et naturel avec les mê mes troubles viscé raux. L’oubli s’é tendait maintenant sur des anné es entiè res et troublait complè tement son existence: elle accourait alors se faire transformer de nouveau. Cela se prolongea ainsi comme je l’ai dit pendant quinze ans, jusqu’à la mort de la pauvre fille qui succomba à la tuberculose pulmonaire.
Comment comprendre ces deux é tats de Marcelline? Ils ressemblent tout à fait aux somnambulismes dominateurs de Fé lida qui pré sentait é galement deux é tats, l’un triste et incomplet avec des grands oublis, l’autre alerte avec l’inté gralité de la sensibilité et de la mé moire. Les é tats de Marcelline leur ressemblent tellement qu’on pourrait appeler cette malade une Fé lida artificielle. Il faudra donc lui appliquer les conventions proposé es par M. Azam et par tous les é crivains posté rieurs: il faudrait dire que l’é tat I c’est l’é tat de dé pression dans lequel nous l’avons trouvé e au dé but et que l’é tat II c’est l’é tat d’activité qui a é té surajouté artificiellement. Ces dé nominations me paraissent tout à fait incorrectes quand on les applique à ce cas que j’ai suivi si longtemps. Il est absurde d’appeler é tat I ou é tat naturel un é tat de dé pression incompatible avec la vie. Il est invraisemblable que cette jeune femme ait toujours é té dè s le commencement de sa vie dans un é tat pareil. En ré alité cela est faux, elle a commencé dans son enfance avant la puberté par avoir à sa disposition toutes ses sensibilité s et toutes ses fonctions: c’est là le vé ritable é tat I. L’é tat dans lequel nous avons l’avons vue à l’hô pital est un é tat anormal amené par l’hysté rie, qui avait é volué depuis la puberté, c’est l’é tat II. Mais que faisons-nous alors de l’é tat obtenu en apparence par les pratiques de l’hypnotisme? Est-ce un é tat III? En aucune faç on, dans cet é tat elle retrouvait les fonctions normales, la sensibilité et la mé moire qu’elle avait autrefois, je ne vois aucune raison pour distinguer cet é tat de l’é tat naturel de son enfance que nos avons appelé é tat I. C’est tout simplement une gué rison momentané e dé terminé e par une excitation artificielle qui alterne avec des rechutes de la maladie [49].
Je crois qu’il en est absolument de mê me pour tous les autres cas que l’on a embrouillé s par des dé nominations fausses. Fé lida aussi a eu dans l’enfance un é tat I qui aprè s la puberté a cessé d’ê tre permanent. Il ne ré apparaissait plus que dans les pé riodes d’é tat alerte, improprement appelé es pé riodes d’é tat second. On a remarqué avec é tonnement qu’à la fin de sa vie cet é tat existait presque seul, c’est tout simplement parce que l’hysté rie é tait gué rie et que la malade revenait à l’é tat normal de son enfance. Il n’y avait d’anormal que l’é tat d’anesthé sie et d’amné sie survenu graduellement aprè s la puberté et qu’on avait pris à tort pour un é tat prime parce qu’il durait depuis longtemps quand on a observé le sujet pour la premiè re fois. Les choses sont ainsi un peu plus claires, il y a seulement chez ces malades des changements brusques, sans transition suffisante qui les font passer d’une activité ralentie à une activité plus grande ou inversement. Ces deux é tats mentaux se sé parent l’un de l’autre exactement comme dans les cas plus simples les idé es et les sentiment se sé paraient l’un de l’autre. Ils cessent de se rattacher comme chez les individus normaux par des gradations et des souvenirs. Ils s’isolent l’un de l’autre par les phé nomè nes d’amné sie et forment en apparence deux existences, deux personnalité s sé paré es.
4. - Les somnambulismes artificiels,
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Je ne voudrais pas terminer cette é tude des somnambulismes hysté riques sans indiquer à sa place sinon une forme nouvelle, au moins un caractè re important de toutes les formes pré cé dentes.
Une proprié té trè s curieuse des accidents hysté riques, qui ne leur est pas sans doute absolument propre, mais qui est rare à ce degré, c’est qu’ils peuvent ê tre artificiellement reproduits. Dans la plupart des maladies les accidents ne sont pas à notre disposition; pour ne prendre qu’un exemple frappant nous ne sommes pas du tout les maî tres d’un accè s é pileptique, nous ne pouvons pas l’arrê ter à notre gré et nous ne pouvons pas le reproduire, le faire ré apparaî tre quand nous le dé sirons. C’est une maladie sur laquelle actuellement, l’expé rience a peu de prise. Autrefois il en é tait ainsi des trois quarts des maladies; aujourd’hui, grâ ce aux dé couvertes de la physiologie, de la microbiologie et quelquefois de la psychologie, on commence à pouvoir reproduire dans le laboratoire l’accident maladif qu’on dé sire é tudier. C’est le dé but de la science mé dicale et quelquefois de la thé rapeutique que de pouvoir dé terminer ainsi à volonté l’é closion d’une maladie.
Eh bien, ce caractè re singulier est dé veloppé au plus haut point dans les né vroses hysté riques et il se retrouve surtout dans tous ces somnambulismes dont nous venons de parler. Il faut remarquer d’abord que c’est là un caractè re trè s net des somnambulismes monoï dé iques, ou des idé es fixes à forme somnambulique. Il nous suffit de faire naî tre dans l’esprit du sujet d’une maniè re plus ou moins pré cise l’idé e dont le dé veloppement remplit le somnambulisme pour que celui-ci ré apparaisse. Quelquefois, pour faire naî tre cette idé e, il faut la rappeler complè tement, la dé crire, insister sur les images qui la constituent, souvent il suffit d’un signe, il suffit d’é voquer un terme associé avec cette idé e pour que, grâ ce à l’association automatique des images, tout le reste du somnambulisme se dé veloppe. Parlez de Pauline à cette jeune femme qui voulait l’imiter en se jetant par la fenê tre et elle va rê ver au suicide de sa niè ce, se diriger vers une fenê tre et recommencer toute la scè ne. Interrogez Irè ne sur la mort de sa mè re, vous allez voir l’un ou l’autre de ces phé nomè nes diffé rents. Ou bien, comme nous l’avons noté, elle comprend mal la question, nous ré pond vaguement, n’a pas de souvenirs pré cis relatifs à la mort de sa mè re, ni mê me à sa maladie. Ou bien, si vous insistez beaucoup, si vous rappelez des faits caracté ristiques de l’agonie, le sujet va se troubler, il va cesser de nous entendre et de voir les choses environnantes. Bientô t il s’isolera dans son rê ve et alors il ré citera avec dé clamation les dé tails de l’agonie dont nous parlions, il jouera la scè ne de la mort et sa propre tentative de suicide sous une locomotive: le somnambulisme aura recommencé.
Cette remarque s’applique à plus forte raison aux attaques hysté riques, à ces formes incomplè tes du somnambulisme mê lé es à divers agitations motrices. Ceux qui ont dé crit les points hysté rogè nes et les points hypnogè nes avaient insisté sur ce caractè re: c’est que l’on pouvait à tout moment, par l’excitation de ces points, faire retomber la malade dans l’attaque ou dans le sommeil. L’une tombait en convulsions dè s qu’on lui pressait le bas-ventre, l’autre en attaque de sommeil dè s qu’on lui touchait l’un des seins. Nous savons maintenant ce que ces phé nomè nes signifient: ils rentrent dans le groupe des pré cé dents, la sensation provoqué e est encore un signal associé avec le groupe des phé nomè nes psychologiques de la crise.
Cette reproduction artificielle est encore possible quand il s’agit du somnambulisme polyidé ique dans lequel le rê ve, une fois commencé, se transforme par l’adjonction de circonstances nouvelles, quand il s’agit des fugues elles-mê mes, que l’on peut faire recommencer en insistant sur l’idé e dominante beaucoup des fugues du jeune Rou… ont é té en quelque sorte expé rimentales; ce sont des camarades qui les ont provoqué es en rappelant par leurs bavardages les histoires de voyage qui impressionnaient le malade.
Bien plus, et le fait est peu connu, les doubles existences peuvent ê tre reproduites expé rimentalement. Les sujets que les anciens magné tiseurs cherchaient à transformer pour les rendre lucides et qui, tous les jours pendant des anné es, é taient plongé s dans un é tat psychologique anormal, finissaient par avoir deux personnalité s trè s distinctes. J’ai dé crit autrefois sous le nom de Lé onie un cas de ce genre vraiment remarquable. L’observation de Marcelline que nous venons de ré sumer à propos des doubles existences nous a montré une vé ritable Fé lida artificielle.
Les é tats ainsi reproduits artificiellement, les somnambulismes surtout ne tardent pas à se modifier un peu. Au bout d’un certain temps ils ne sont plus entiè rement identiques aux phé nomè nes primitifs et naturels. Cela tient à ce que, comme nous l’avons vu à propos des somnambulismes polyidé iques, de nouvelles idé es peuvent se dé velopper dans cet é tat sans l’arrê ter immé diatement. Une nouvelle idé e, un nouveau sentiment se sont dé veloppé s pendant cet é tat et tendent à lui donner une nouvelle unité, c’est l’idé e de l’expé rimentateur qui a dé terminé le somnambulisme, c’est le sentiment particulier qu’il inspire au sujet. Au dé but l’expé rimentateur ne pouvait que difficilement s’introduire dans le somnambulisme dont il avait seulement dé terminé la ré apparition, il n’é tait compris du sujet que s’il lui parlait de son propre rê ve et souvent il cessait vite d’ê tre entendu. Mais peu à peu il devient lui-mê me partie inté grante du rê ve du somnambule, il est toujours entendu et compris, il dirige la pensé e en dehors de l’idé e fixe dominante et inspire toute les pensé es qu’il dé sire. Cette influence de plus en plus grande que l’expé rimentateur prend sur son sujet ne tarde pas à transformer le somnambulisme, à lui donner une forme et des lois souvent bizarres qui ré sultent simplement des habitudes de l’expé rimentateur. L’un apprend à son sujet à parler toujours en tutoyant pendant l’é tat somnambulique, tandis qu’il dit « vous » dans l’é tat normal, un autre l’habitue à s’endormir profondé ment quand on lui touche le vertex. Ce sont des phé nomè nes de ce genre qui ont é té pré senté s autrefois comme des lois du somnambulisme et qu ont donné lieu, à l’é poque de Charcot, à tant de discussions passionné es. C’est ainsi que se forme chez certains sujets un somnambulisme artificiel qui semble assez particulier pour qu’on l’ait baptisé d’un nom spé cial et qu’on en fasse un é tat hypnotique.
Les é tats ainsi reproduits artificiellement, les somnambulismes surtout ne tardent pas à se modifier un peu. Au bout d’un certain temps ils ne sont plus entiè rement identiques aux phé nomè nes primitifs et dé jà plus ou moins complets chez des hysté riques. Faut-il attribuer la mê me nature aux é tats hypnotiques que l’on obtient quelquefois, plus rarement qu’on ne le croit, chez des sujets en apparence sains, en apparence indemnes d’accidents hysté riques? En d’autres termes, l’hypnotisme dé terminé artificiellement chez des sujets en apparence bien portants est-il toujours un phé nomè ne hysté rique, un somnambulisme hysté rique soumis aux mê mes lois de la dissociation mentale que les somnambulismes pré cé dents?
On se souvient des grandes batailles que cette question a soulevé es autrefois, je ne puis les recommencer ici. Je dois me borner à rappeler l’opinion que j’ai dé fendue longuement dans beaucoup d’ouvrages et qui me paraî t encore la plus exacte.
É vitons, pour ne pas embrouiller le problè me, d’é tudier des é tats frustes, indistincts analogues à des somnolences quelconques ou à des é tats é motifs plus ou moins inté ressants. Ne considé rons que les vé ritables sommeils hypnotiques dans lesquels l’activité mentale est assez dé veloppé e pour que le sujet puisse comprendre la parole et dans lesquels cependant cette activité mentale est assez diffé rente de la pensé e de la veille pour qu’il y ait amné sie consé cutive, nous pourrons toujours faire alors facilement les quatre remarques suivantes: 1° Si on fait l’analyse des caractè res psychologiques pré senté s par de tels é tats on ne trouvera aucun caractè re nouveau qui n’appartienne dé jà aux divers somnambulismes hysté riques. Les modifications apparentes sont insignifiantes et s’expliquent trè s bien comme des ré sultats de l’é ducation; 2° Si on examine sans parti pris les sujets sur lesquels ces é tats ont pu ê tre dé terminé s on verra que le plus souvent il s’agit d’hysté riques incontestables ayant dé jà eu autrefois des somnambulismes sous une forme quelconque ou bien ayant pré senté d’autres accidents de la né vrose, et pré sentant l’é tat mental caracté ristique de l’hysté rie; 3° On pourra vé rifier que les sujets atteints d’autres maladies, les é pileptiques par exemple, les psychasté niques, tourmenté s par la folie du doute, les alié né s atteints de dé lires systé matiques, etc., ne sont pas du tout hypnotisables et qu’on ne peut jamais reproduire sur eux un é tat hypnotique net avec amné sie consé cutive; 4° Ce somnambulisme artificiel se gué rit et disparaî t de la mê me maniè re que les somnambulismes naturels de l’hysté rie: un sujet dont l’hysté rie s’atté nue, qui tend vers la gué rison, cesse peu à peu d’ê tre hypnotisable.
Ces remarques, qui n’ont jamais é té suffisamment contredites, me semble dé montrer qu’il n’y a pas lieu de cré er un groupe clinique spé cial pour les é tats hypnotiques; ce sont des somnambulismes analogue à tous les pré cé dents et qui en diffè rent seulement par ce fait qu’ils sont obtenus artificiellement au lieu de se dé velopper spontané ment.
Il n’en reste pas moins un problè me extrê mement inté ressant à é tudier: comment l’expé rimentateur parvient-il à dé terminer sur ces sujets une apparence sains une modification mentale aussi remarquable? Ce problè me est d’ailleurs le mê me que celui de la provocation de l’hysté rie: des traumatismes, de grandes é motions comme celles qu’é prouve une fille en assistant à la mort de sa mè re font naî tre é galement chez des sujets qui, auparavant, paraissaient sains des é tats somnambuliques tout aussi remarquables. Il est probable que l’expé rimentateur ré ussit à dé terminer un é tat é motif violent qui prend une apparence particuliè re parce que l’é tat mental du sujet est en é quilibre instable et qu’il avait une pré disposition à des troubles mentaux d’un certain genre. Ce problè me fort difficile à é tudier se rattache, en somme, à cette remarque gé né rale: c’est que les accidents hysté riques peuvent ê tre reproduits artificiellement.
5. – Les crises d’agitation
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On observe chez les autres malades, chez les psychasté niques, des groupements de symptô mes analogues à ceux qui ont constitué des attaques hysté riques. Le premier de ces groupements mé rite, en effet, d’ê tre comparé à l’attaque que nous venons d’observer; c’est un phé nomè ne si analogue qu’il est trè s souvent confondu avec elle. Il y a à mon avis un diagnostic mé dical inté ressant, dont on parle trop rarement et qui devrait toujours ê tre fait, c’est le diagnostic de la crise d’agitation forcé e des psychasté niques et de l’attaque proprement hysté riques. Ce diagnostic est beaucoup plus inté ressant qu’on ne le croit au point de vue du diagnostic et du traitement.
Les diverses agitations que nous avons dé crites chez les né vropathes obsé dé s et douteurs sont bien loin d’ê tre continuelles. Il n’est pas exact que ces malades aient continuellement des obsessions, des interrogations, des tics, des convulsions ou des angoisses viscé rales. Mê me au plus fort de leur maladie ils restent pendant de longues pé riodes parfaitement tranquilles; je ne dis pas qu’ils n’aient pas de troubles, ils conservent plusieurs des insuffisances dont nous avons parlé, mais ces phé nomè nes ne les gê nent pas et ne s’accompagnent pas d’agitation. Au contraire toutes ces agitations mentales, motrices ou viscé rales se groupent, se ré unissent à certains moments et constituent de vé ritables crises. Ces crises ne sont pas tout à fait aussi nettes que celles des hysté riques. Leur commencement et leur terminaison ne sont pas aussi exactement dé terminé s et surtout on n’observe pas cette perte et ce retour au moins apparent de la conscience qui semblent marquer le commencement et la fin de l’attaque. Mais nous savons qu’il ne s’agit pas là d’un é vanouissement vé ritable et que les hysté riques changent seulement d’é tat de conscience. Chez ces nouveaux malades, il y a é galement un certain changement de conscience, mais il est moins brutal et passe plus facilement inaperç u. Ces crises psychasté niques sont é galement un peu plus longues au moins dans la moyenne des cas, surtout si l’on songe que leurs limites sont plus vagues. Enfin ces crises, au moins pendant un certain temps, sont plus fré quentes et peuvent assez facilement s’intriquer l’une dans l’autre de telle maniè re qu’une seconde crise commence quand la premiè re n’est pas entiè rement terminé e. Ce sont ces diffé rences qui font croire que les hysté riques seuls ont des attaques et qui font mé connaî tre les crises des psychasté niques. Il est je crois inté ressant de se repré senter de la mê me maniè re le groupement des phé nomè nes d’agitation chez ces deux groupes de né vropathes.
Comment commencent ces crises d’agitation psychasté nique? Il faut d’ailleurs remarquer qu’elles ne se dé veloppent pas perpé tuellement pendant toute la vie des malades, il faut une certaine pré paration de l’esprit, analogue à la pé riode de rumination de l’hysté rique. Cette pé riode est si importante que nous l’é tudierons plus longuement dans le prochain paragraphe: rappelons-nous seulement pour le moment que ces sujets sont dé jà des malades mal disposé s, souffrants, mais cependant assez calmes. À quelle occasion se dé clanche leur agitation? Au premier abord on a envie de faire à cette question un ré ponses analogue à celle que l’on faisait pour expliquer le dé but de l’attaque hysté rique. Il survient dira-t-on un é vé nement quelconque qui rappelle au malade par association d’idé es l’obsession ou la phobie qui le tourmente. Une malade qui a l’obsession des choses religieuses et des sacrilè ges voit un crachat par terre qui le fait penser à l’Eucharistie, un hypocondriaque voit passer un enterrement, etc. Mais nous avons dé jà remarqué que l’association des idé es n’a pas du out chez ces malades la mê me rigueur que chez l’hysté rique et qu’en ré alité c’est le malade lui-mê me qui explique par la ressemblance du crachat avec l’hostie une obsession ou une crainte qui se dé veloppait dans son esprit pour d’autres raisons. Les causes occasionnelles des crises d’agitation me paraissent diffé rentes et plus inté ressantes [50].
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