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DEUXIÈME PARTIE 2 страница
Ce dé lire sous forme d’é criture automatique s’observe trè s fré quemment et peut prendre des formes trè s graves. Cependant dans les cas les plus ordinaires il est simplement risible: qui n’a pas connu ces familles é ploré es, au dé sespoir, parce que la jeune fille de la maison voulait é voquer des anges et que sa main, guidé e par le dé mon, n’é crit que des obscé nité s?
Cette premiè re forme du phé nomè ne nous permet de mieux comprendre d’autres accidents du mê me genre. À cô té de l’é criture automatique il a la parole automatique. On connaî t l’histoire des petits prophè tes cé vé nols pendant la ré volte des Camisards: ils parlaient involontairement en croyant obé ir à une impulsion é trangè re: « ils é coutaient, dit un té moin, leurs propres paroles comme provenant de l’Esprit. Ils avaient le sentiment que leurs idé es leur é taient fournies à mesure que les mots leur é taient dicté s, que leur langue é tait mise en mouvement sans qu’ils y fussent pour rien ». Au XVIIIe siè cle, Carré de Montgeron dé crivant les convulsionnaires du cloî tre Saint-Mé dard racontait le fait suivant: « Il arrive souvent que la bouche des orateurs prononce une suite de paroles indé pendantes de leur volonté en sorte qu’ils s’é coutent eux-mê mes comme les assistants et qu’ils n’ont connaissance de ce qu’ils disent qu’à mesure qu’ils le prononcent ». Beaucoup de nos malades pré sentent aujourd’hui des phé nomè nes du mê me genre et quand nous parlerons du mutisme nous verrons plusieurs sujets qui ne peuvent plus parler volontairement, mais qui sont tout é tonné s d’entendre leur bouche prononcer des paroles qu’ils n’ont ni voulues, ci conç ues.
D’autres actes que la parole peuvent ê tre ainsi en rapport avec ce dé lire partiel qui semble se dé velopper au-dessous de la conscience normale et qui mé rite d’ê tre appelé subconscient. Je rappelle seulement un fait amusant que j’ai dé crit autrefois [5]: une femme de vingt ans, B… qui avait dé jà pré senté toutes sortes d’accidents né vropathiques venait se plaindre de ce qu’elle appelait des vertiges. Quand elle marchait dans la rue, le sol se dé robait tout à coup sous ses pieds, elle se sentait pré cipité e en avant et devait se retenir pour ne pas tomber. Ce vertige qui ne se rattachait à aucun symptô me pré cis a paru longtemps inexplicable jusqu’à ce que nous ayons pu pé né trer dans les rê veries qui remplissaient la conscience de la malade à son insu. Quelque temps auparavant elle avait fait une visite à ses parents et ceux-ci lui avaient violemment reproché sa conduite irré guliè re. En revenant, elle rê vait à ces accusations et prenait dans son rê ve une ré solution qui simplifie toujours beaucoup les choses, celle de se jeter à la Seine; elle enjambait alors le parapet et sautait dans l’eau. Mais cette chute imaginaire faite simplement dans la rue dé terminait un soubresaut qui la ré veillait; elle se sentait alors tomber en avant sans savoir pourquoi et é prouvait cette impression de vertige dont elle é tait venue se plaindre.
Une derniè re forme bien inté ressante de ces idé es fixes partielles est la forme hallucinatoire. Au milieu de ses autres pensé es, le sujet est tout d’un coup é tonné par une hallucination qui lui apparaî t sans qu’il en sache l’origine. Il est facile de montrer que cette hallucination n’est qu’un fragment de tout un rê ve, de toute une idé e fixe dont la plus grande partie reste latente. Il est curieux de voir les deux formes de l’idé e fixe chez certains sujets. Cu… par exemple, a des accidents somnambuliques analogues aux pré cé dents dans lesquels elle rencontre un individu nommé Joseph, le voit, s’entretient avec lui et ne lui refuse rien. Mais au milieu de la journé e, le mê me sujet bien tranquille voit subitement apparaî tre la tê te de Joseph, ou sent l’odeur de sa cigarette, ou sent sa joue frô lé e par une moustache. Une pauvre mè re qui a perdu ses deux enfants voit des draps noirs, des squelettes, un corbillard qui passe dans la salle.
Enfin je crois que dans certains cas, la manifestation de ces idé es fixes partielles peut ê tre encore plus ré duite et qu’il faut quelquefois rattacher à ces phé nomè nes des é motions subites, des peurs inexplicables qui traversent tout d’un coup la conscience du sujet sans rapport apparent avec les idé es qu’il a en ce moment. Telles sont les diverses formes complè tes ou incomplè tes des idé es fixes à forme somnambulique ou à forme mé dianimique que l’on observe chez les hysté riques.
3. - Les obsessions.
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Les idé es qui troublent l’esprit sont loin de se pré senter toujours sous la forme que nous venons de dé crire. Chez d’autres né vropathes, peut-ê tre plus nombreux que les pré cé dents, que j’ai proposé de dé signer sous le nom de psychasté niques, on observe des troubles intellectuels analogues qui consistent aussi dans l’importance exagé ré e que prend une certaine idé e et dans les troubles que cette idé es entraî ne avec elle; mais chez eux les idé es pathologiques ne se pré sentent pas de la mê me maniè re. Il s’agit des obsessions des psychasté niques, et nous verrons peu à peu en quoi elles diffé rent des idé es fixes des hysté riques.
L’aspect de ces malades et la maniè re mê me dont nous connaissons leurs troubles sont tout à fait diffé rents. On vient de voir que l’hysté rique, dans les cas typiques, oublie complè tement le sujet de ses rê ves et la scè ne qu’elle a joué e pendant la crise pré cé dente. Quand elle est revenue à l’é tat normal, elle peut tout au plus nous raconter qu’elle a souvent de singuliè res attaques, qu’on lui a dit qu’elle parlait, qu’elle remuait, mais elle sait trè s vaguement de quoi il s’agit. Souvent, il est curieux d’observer que, pendant cet é tat normal, elle n’est pas du tout pré occupé e du sujet qui devient idé e fixe dans ses crises, elle l’a quelquefois entiè rement oublié. L’autre malade dont il nous reste à parler, est tout à fait diffé rent: il est embarrassé, gê né, il a peine à s’exprimer; mais, en ré alité, il sait parfaitement ce qui le tourmente. Au lieu d’apprendre par l’entourage du malade le sujet de l’idé e fixe, c’est par le malade lui-mê me que nous apprenons le contenu de l’obsession, car il peut en indiquer tous les dé tails. Il en ré sulte que la crise dans laquelle cette idé e se dé veloppe est beaucoup moins nette, elle n’a pas un commencement et une fin bien dé terminé es. La pré occupation est presque continuelle et pré sente simplement des moments d’exaspé ration.
Voyons donc, d’aprè s les dires des malades, les idé es qui les pré occupent; nous reprendrons ensuite les caractè res de ces obsessions en mê me temps que ceux des idé es fixe pré cé dentes. Les sujets de ces obsessions peuvent ê tre extrê mement varié s et la liste en serait interminable. J’ai cependant essayé de les ré partir en quelques groupes qu’il me semble inté ressant de conserver pour mettre un peu d’ordre dans l’exposé [6].
1° Obsessions et impulsions sacrilè ges. ¾ Dans un premier groupe, il s’agit é videmment d’obsessions religieuses, mais ce sont des idé es religieuses toutes spé ciales et ayant un aspect horrible, monstrueux, en dehors de toute croyance raisonnable. Au lieu de se pré occuper des é vé nements de la vie commune, de la mort d’un enfant, de l’absence d’une personne aimé e, ces malades songent à des crimes religieux, irré alisables et fantastiques. Un homme de quarante ans, aprè s beaucoup de tergiversations, nous fait l’aveu de ce qui le tourmente jour et nuit. Il vient de perdre, il y a deux ans, son pè re et son oncle pour qui il avait la pus grande affection et la plus grande vé né ration: il les pleure, cela est naturel. Va-t-il ê tre obsé dé par l’image de leur figure comme une hysté rique pleurant son pè re? Non. Il est obsé dé par la pensé e de l’â me de son oncle. Mais ce qui est effroyable, c’est que l’â me de son oncle est associé e, juxtaposé e ou confondue (nous savons que ces malades s’expriment trè s mal) avec un objet ré pugnant: des excré ments humains. « Cette â me gî t au fond des cabinets, elle sort du derriè re de M. un tel, etc., etc. ». Il fait une foule de variations sur ce joli thè me et il pousse des cris d’horreur, se frappe la poitrine: « Peut-on concevoir abomination pareille, penser que l’â me de mon oncle c’est de la m… ». Le cas est inté ressant par sa grossiè reté; une idé e de ce genre pré sente, à mon avis, un cachet tout spé cial: elle avertit dé jà le mé decin qui ne le rencontrera guè re en dehors du dé lire du scrupule.
J’ai beaucoup insisté sur le cas d’une jeune fille qui croit constamment voir devant elle les parties sexuelles d’un homme en train de souiller une hostie consacré e. Il est bon de remarquer qu’elle ne se borne pas à regarder ce spectacle imaginaire, à mé diter sur lui, elle pré tend ê tre poussé e à y collaborer, à souiller elle-mê me l’hostie, à commettre toutes sortes d’actes immodestes et sacrilè ges. D’autres ré pè tent sans cesse: « Je pense tout le temps que le diable me pousse à faire des malpropreté s pour m’empê cher de faire mon salut ».
Enfin, ce qui est banal chez tous, c’est l’idé e du blasphè me, « parler mal des choses divines, penser au dé mon en faisant des priè res et insulter Dieu au lieu de le prier…, ne savoir exprimer que la haine de Dieu d’une faç on mauvaise et grossiè re, se ré volter contre Dieu et le maudire, dire des blasphè mes dè s qu’on pense à la religion… cochon de Dieu, etc. », telles sont les paroles que ré pè tent un grand nombre de ces malades. Ceux-là mê mes qui ont des obsessions d’une autre nature mê lent la divinité et la religion à leur maladie « Je suis damné e, je lutte contre Dieu lutte contre mon cerveau malade, je me moque de Dieu si je consens à me soigner ». L’idé e de sacrilè ge se mê le aux autres idé es.
2° Obsessions et impulsions du crime. ¾ Plus fré quemment peut-ê tre les malades sont pré occupé s d’idé es morales et pensent constamment à quelque action criminelle qu’ils ne veulent pas faire et qui les tente cependant. Dans les cas complets, l’impulsion est indissolublement associé e à l’obsession proprement dite. L’un se figure qu’il est poussé à violer une vieille femme, sur un banc, devant une é glise. Un autre pré tend ê tre poursuivi par la tentation de frapper les gens avec un couteau pointu «qui crè ve les yeux, qui entre bien ». Ger… est poussé e à couper la tê te de sa petite-fille, et à la mettre dans l’eau bouillante. D’ailleurs, on ne peut compter les scrupuleux qui ont des impulsions à frapper des gens et surtout à frapper leurs enfants à coups de couteaux. Dans une confé rence que je faisait ré cemment à la Salpê triè re sur ces malades, j’avais pu ré unir cinq mè res de famille, ré pé tant toutes en pleurant exactement la mê me chose: que quelque chose les poussait à frapper leurs petits enfants avec un couteau pointu. Ces obsessions impulsives, qui semblent pousser les malades à l’homicide, sont parmi les plus fré quentes et les plus connues. Schopenhauer rapportait dé jà un cas d’impulsion à l’homicide chez un malade qui avait conscience de l’absurdité d’une semblable idé e et s’en dé solait. Maudsley, Magnan, Saury en dé crivent de nombreux exemples. Dans une observation de M. Magnan, le malade veut simplement mordre et manger la peau qu’il aura arraché e. On peut donc ré unir dans un premier groupe toutes les obsessions-impulsions à des actes de violence quelconque.
L’impulsion au suicide vient par ordre de fré quence aprè s l’impulsion au meurtre. Nous la retrouvons chez beaucoup de nos malades, chez Nadia, par exemple, qui, dans une rê verie romanesque, arrive à se repré senter qu’elle se noie dans la mer Baltique.
Les obsessions et les impulsions gé nitales seront naturellement parmi les plus remarquables. Combien de jeunes filles ont peur de rester libres, veulent se ré fugier dans des couvents, parce qu’elles se figurent ê tre poussé es à s’approcher de leurs frè res ou de tous les hommes qui entrent. À propos de ces impulsions gé nitales, je voudrais signaler en deux mots une idé e obsé dante, à laquelle des é vé nements ré cents donnent quelque inté rê t. Beaucoup de ces malades, des hommes ou des femmes, se pré tendent atteints d’inversion sexuelle et dé plorent le triste penchant qui les pousse vers le mê me sexe. Je ne discute pas ici la question dé licate des invertis sexuels, mais je suis convaincu que trop souvent on a fait des thé ories sur l’inversion sexuelle à propos de simples né vropathes ayant une impulsion vers cette action, comme ils auraient une impulsion à un crime quelconque, simplement parce qu’ils se la repré sentent comme criminelle. Inutile d’é numé rer les impulsions à d’autres actions malhonnê tes, à voler, à mentir, à quitter le travail, à boire de l’alcool, à absorber des poisons, à ré sister à toute les idé es que la religion ou la morale commandent.
3° Obsessions et impulsions de la honte de soi. ¾ Un autre genre d’obsessions voisin des pré cé dents, bien entendu, mais un peu plus simple peut-ê tre se retrouve chez les scrupuleux, soit en coexistence avec les obsessions du sacrilè ge et du crime dans les cas plus grave. Il m’est difficile de ré sumer par un mot le caractè re gé né ral qui se retrouve dans les idé es de ce groupe. Il s’agit non seulement de remords proprement dits, mais de mé pris, de mé contentement portant, non seulement sur les actes, mais sur les faculté s morales, sur la personne du sujet. Le malade a constamment l’idé e que ce qu’il fait, que ce qu’il est, que ce qui lui appartient est mauvais. Le caractè re qui me semble le plus gé né ral, c’est le sentiment de honte, quoique, dans certains cas, la honte soit lé gè re et qu’il s’agisse surtout de mé contentement. C’est pourquoi nous ré unissons ces faits sous le nom gé né rique: d’obsessions de honte.
Le malade se tourmente et s’accuse constamment à propos de tout de ce qu’il fait; il est poussé à se dé nigrer, à s’humilier quand ce n’est pas à se punir lui-mê me et à se torturer. On ne peut é numé rer toutes les formes bizarres que prennent ces obsessions. Tantô t il s’agit d’un mé contentement portant sur l’intelligence, sur les sens: les malades sont convaincus ou pré tendent l’ê tre qu’ils ne peuvent pas voir ni entendre; ils veulent toucher pour vé rifier tous les objets et recommencer indé finiment la vé rification. Ils sont obsé dé s par la pensé e de la folie, pré tendent ê tre fous, et, ce qui est pis, se sentent poussé s à se conduire comme des fous: « Je vois les maisons et les gens à l’envers, je dis des sottises, je vais me cogner la tê te contre les murs, regardez donc mes yeux, vous verrez comme ils sont é garé s ». Ils ont l’obsession que leur personnalité est changé e, que leur mé moire est transformé e. La cé lè bre obsession du « dé jà vu » rentre dans cette caté gorie. Le malade, à tout moment, dans quelque é tat qu’il soit, ne peut fixer son attention sur aucun é vé nement, sans avoir l’idé e que cet é vé nement, sans avoir l’idé e que cet é vé nement s’est dé jà passé exactement de la mê me maniè re, dans les mê mes circonstances, il y a un an. D’autres critiquent leurs propres sentiments; il y a mê me, à ce propos, une maladie qui mé rite d’ê tre appelé e la maladie des fiancé es. Ce sont des jeunes filles tourmenté es par la pensé e qu’elles n’aiment pas bien leur fiancé, qui font des efforts dé sespé ré s pour « l’aimer » et qui en arrivent, à force de perfectionnements, à le dé tester. Des obsessions d’envie, des dé sirs immodé ré s d’indé pendance rentrent aussi dans ce groupe, et, dans bien des cas obsessions amoureuses ne sont qu’une forme de la honte de soi. Dans ces obsessions, le phé nomè ne gé nital, si mê me il existe, ne joue qu’un rô le accessoire, tandis que l’amour moral, le besoin de vivre auprè s d’une personne dé terminé e, de penser constamment à elle, de lui subordonner toutes les actions de la vie devient l’essentiel. Si les malades ne peuvent plus se passer de cette personne s’ils se sentent seuls, s’ils croient devenir fous par isolement quand elle les abandonne, c’est qu’ils croient ê tre incapables de se diriger seuls et qu’ils ont un besoin obsé dant de cette direction ou de cette excitation trè s spé ciale qui les remonte. Des impulsions é videntes à courir aprè s une personne dé terminé e, à l’entourer, à s’occuper d’elle, accompagnent cette obsession. J’ai vu des impulsion bizarres à la gé né rosité, des impulsions à faire des cadeaux, à rendre sans cesse des services qui n’é taient autre chose qu’une manifestation de la honte de soi.
4° Obsessions de la honte du corps. ¾ Cette idé e du mé pris de soi-mê me, cette obsession du mé contentement personnel porte bien plus souvent encore sur la personne physique, sur le corps. Les malades chez qui l’on rencontre ce mé contentement de leur corps sont fort nombreux; ils forment un groupe singulier dont on ne pourrait pas soupç onner l’importance avant de les avoir fré quenté s. On pourrait les appeler tous des « honteux de leur corps ». Les plus complets ont une obsession relative à leur corps tout entier; à toutes ses parties, et, par consé quent, leur obsession gé né rale se subdivise en une foule de petits dé lires particuliers. Les autres vont moins loin dans la mê me voie et leur obsession de honte ne porte par sur tout l’organisme, mais elle se systé matise sur telle ou telle partie, telle ou telle fonction dont ils sont particuliè rement honteux.
L’une des formes les plus curieuse et les plus dangereuses de cette honte du corps est celle qui s’accompagne d’une impulsion à refuser toute nourriture. Pour une raison quelconque, les jeunes gens ou les jeunes filles trouvent qu’ils grandissent trop et surtout qu’ils grossissent trop. Ils ont peur de devenir des grandes personnes, de ne plus ê tre aimé s et proté gé s comme des enfants ou bien ils croient qu’ils vont devenir trop gros ou trop laids, qu’ils seront ridicules et mé prisé s, ou bien ils sont effrayé s par le dé veloppement des organes sexuels, des seins, et ils mê lent à la honte du corps une obsession gé nitale. Dans tous ces cas, ils se sentent poussé s à arrê ter cet embonpoint en ne mangeant plus; ils montrent une ré sistance invraisemblable, dé ploient une grande habileté pour arriver à supprimer toute alimentation et ils tombent dans des é tats de maigreur parfois extraordinaires.
Si la honte porte sur telle ou telle partie du corps, nous aurons la honte et la crainte de la rougeur au visage qui a é té si souvent é tudié e dans ces derniè res anné es, la honte des mains, la crainte des taches, la honte de l’é criture qui joue un rô le si important dans ce qu’on a appelé souvent à tort la crampe des é crivains, la honte des fonctions de la vessie, les obsessions de honte relatives aux fonctions gé nitales qui rendent fré quemment les jeunes gens impuissants; enfin faut-il rappeler l’obsession relative aux gaz abdominaux et ces personnes qui se cloî trent volontairement, qui refusent de voir personne, parce qu’elles sont convaincues qu’on va se boucher le nez se elles approchent.
On remarquera que dans tous ces cas des impulsions à des actes dé terminé s accompagnent toutes ces obsessions. Non seulement le malade pense qu’il est trop gros ou qu’il va lâ cher des gaz, mais encore il refuse de manger, il refuse de sortir, il est poussé à se faire vomir ou à se teindre le visage en rouge, afin qu’on ne voie pas apparaî tre la rougeur é motive.
5° Les obsessions hypocondriaques. ¾ Un autre groupe d’obsessions se rencontre aussi fré quemment que les pré cé dentes chez les mê mes sujets: ce sont des pré occupations qui ont rapport à leur propre santé ou à leur propre vie, en un mot, des pré occupations hypocondriaques. La forme typique de cette obsession sera naturellement la pensé e de la mort qui se pré sente de diverse maniè res, tantô t la mort est considé ré e comme une maladie, une souffrance terrible que le malade redoute, tantô t elle est considé ré e comme la suppression des joies de la vie et le malade ne peut plus s’inté resser à rien: « Tout est insignifiant, sans valeur, puisque tô t ou tard tout doit ê tre supprimé par la mort. ». Il est inutile d’é numé rer toutes les obsessions dé terminé es par la crainte de se blesser, la peur d’avaler des fragments d’aiguilles, de s’infecter, de se salir, par la pensé e de telle ou telle maladie plus ou moins connue du peuple. L’obsession de la phtisie et bien plus souvent encore l’obsession de la syphilis sont parmi les plus fré quents et les plus redoutables de ces troubles mentaux.
Formes incomplè tes des obsessions. ¾ De mê me que nous avons é tudié les formes incomplè tes des idé es fixes hysté riques, de mê me nous pouvons constater que ces obsessions psychasté niques ne se dé veloppent pas toujours au mê me degré. Quand le phé nomè ne est complet, il contient, comme nous l’avons dit, non seulement des idé es, mais des tendances à l’acte, des impulsions et en mê me temps des peurs, des phé nomè nes é motifs. Ces diffé rents é lé ment peuvent jusqu'à un certain point se sé parer mê me dans l’obsession proprement dite: en particulier l’é lé ment impulsif peut ê tre pré dominant chez le dipsomane, le morphinomane, qui ne ré flé chit guè re et qui n’a que l’impulsion à boire ou à absorber son poison. Au contraire, l’obsession peut rester un phé nomè ne intellectuel sans ê tre accompagné e d’impulsion: par exemple les obsessions du crime peuvent prendre la forme du remords. Le malade ne se sent pas actuellement poussé à accomplir une action criminelle, mais il pense qu’il l’a accomplie autrefois et il est bourrelé de remords. On peut mettre bien entendu au premier rang les remords des fautes religieuses, les dé sespoirs causé s par les confessions insuffisantes ou par les communions pré tendues sacrilè ges. Tous ceux qui s’occupent de maladies mentales ont connu ces femmes affolé es pendant des mois parce qu’elles croient avoir fait entrer un morceau d’hostie dans une dent creuse. Le fait est si banal qu’il a é té bien connu et bien dé crit par les romanciers: on peut relire à ce propos la jolie description de la sœ ur aux scrupules dans le Musé e de bé guines, de G. Rodenbach.
D’autres ont des remords pour tous les crimes possibles qui tout à l’heure provoquaient des impulsions. Une femme, caissiè re dans une maison de commerce est poursuivie par l’idé e qu’elle a mal rendu la monnaie, qu’elle a volé; un homme a l’idé e qu’il a pu tuer quelqu’un; il va dans la rue frô ler les sergents de ville, et il se trouve sur le point de les prier de l’arrê ter.
Dans quelques cas, on pourrait dire que l’obsession se ré duit encore à un seul mot, à une image simple qui apparaî t au malade et qui ré sume ses longs tourments pré cé dents. Par exemple, un jeune homme qui est obsé dé par l’idé e de liberté, en relation, comme on l’a vu, avec le honte de soi, me dé crit cette impression singuliè re. Il se figure en marchant dans la rue qu’il est toujours entouré par quatre arbres, deux par devant, deux par derriè re, et que ces arbres sont relié s par des chaî nes. Ces arbres, il les connaî t bien, ce sont les quatre arbres de la cour du lycé e. Une femme pré tend voir devant elle une tê te humaine traversé e par un long couteau pointu au niveau des yeux. Enfin la plupart des jeunes filles qui ont des obsessions religieuses sont terrifié es par l’apparition d’objets blancs sur le pavé des rues qui sont é videmment des hosties ou par des images de croix ou de saintes qui apparaissent dans les nuages. Il semble donc que ces hallucinations ré duites soient des fragments de l’obsession comme les hallucinations qui apparaissaient subitement pendant la veille des hysté riques é taient des fragments de leurs rê ves somnambuliques. Mais il ne faut pas trop se presser de conclure à une assimilation complè te. Les deux groupes de phé nomè nes que nous venons de dé crire paraissent se ressembler, mais en examinant leurs caractè res nous trouverons de nombreuses diffé rences.
4. - Les caractè res des idé es fixes hysté riques
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Pour comparer ces phé nomè nes reprenons les idé es fixes complè tes, incomplè tes ou partielles, que nous avons observé es dans le premier groupe de malades et voyons leur caractè res essentiels.
1° Le premier caractè re, bien visible et trè s important de ces rê ves, c’est l’intensité et la perfection de leur dé veloppement. Tous les phé nomè nes en rapport avec l’idé e qui domine le rê ve semblent dé mesuré ment grandis. Sans doute, nous avons tous des expressions de physionomie, des attitudes du corps en rapport avec nos sentiments et nos idé es, mais nos expressions semblent petites, incomplè tes, contradictoires à cô té de ces merveilleuses expressions que l’on rencontre chez les somnambules ou chez les extatiques. Quand le sujet agit, il a une pré cision, une complexité de mouvements qui font de lui un admirable acteur, plus habile quelquefois qu’il ne pourrait ê tre à l’é tat de veille. Notre malade, qui croyait sauver son enfant, courait sur les toits mieux qu’il n’aurait pu le faire à l’é tat normal, mê me s’il n’eut pas é té paralysé. Les scè nes é rotiques se dé roulent avec un ré alisme qui n’est troublé par aucune pudeur. Aussi n’est-il pas surprenant, comme nous l’avons vu, que de tels dé lires amè nent quelquefois des actes graves. Beaucoup d’auteurs, comme Legrand du Saulle, 1852, Yellowlees, 1878, Fé ré et Motet, 1881, Pitres, Gilles de la Tourette, Barth, Biaute, 1904, ont signalé des crimes et des suicides commis dans ces conditions.
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