Хелпикс

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Note sur l’édition numérique. 51 страница



— Non! J’ai pas faim... que j’ai ré pondu...

— Alors, ç a va pas l’appé tit?... »

Du coup, il enchaî ne... C’est lui qui me raconte ses histoires... Il é tait fort pré occupé... Il rentrait tout juste de Belgique, il sortait d’un de ces pé trins!... Il l’avait repassé e finalement sa petite pompe « l’extra dé montable » à un consortium de fabriques... À des conditions pas fameuses... Il en avait eu sa claque des litiges, des ré clamations... à propos de tous les brevets... les « multiples », les « ré versibles »... C’é tait marre!... C’é tait pas son genre, les migraines et les avocats... Avec ce petit pognon liquide, il allait se payer quelque chose de bien franc, bien net... une vraie entreprise mé canique... Une affaire dé jà lancé e... pour le retapage des voiturettes... pour les « tinettes » de seconde main... Ç a c’est un blot toujours fructueux... En plus il reprendrait les lanternes et les trompes de tous les clients. Ç a aussi c’é tait dans ses cordes... Il les remettrait au goû t du jour... Pour le petit maté riel d’accessoires, les nickels, les cuivres, y a toujours la demande... Il suffit de suivre Un peu la vogue, ç a se retape comme ci, comme ç a... et puis on retrouve un amateur à trois cents pour cent!... Voilà du commerce!... Il é tait pas embarrassé... Il connaissait toutes les ficelles... Si il tiquait encore un peu c’é tait à cause des locaux... Il voulait encore ré flé chir... C’é tait pas trè s net comme clauses... Y avait un drô le de « pas-de-porte »... Il flairait une petite vape!... La reprise é tait assez lourde!... Il prolongeait les pourparlers... Il avait la leç on... Il avait failli souscrire dans une sorte d’association pour une vé ritable usine de grandes fournitures carrossiè res... à cent mè tres de la Porte Vanves... Ç a s’é tait pas fait... Ils l’empaquetaient dans le contrat... Les copeaux l’avaient saisi au dernier moment... Il se mé fiait de tous les partenaires... Pour ç a, il avait pas tort!... Il ré flé chissait toujours... C’é tait trop beau pour ê tre honnê te!... presque du quarante-sept pour cent!... Ç a! c’é tait sû rement des bandits!... Il devait pas regretter grand-chose!... Sû rement qu’il é tait marron avec des gangsters semblables!... Enfin il a eu tout jacté... tout dé roulé... tout ce qui é tait survenu, dans le dé tail, toutes les bricoles de son business, depuis notre dé part pour Blê me jusqu’au jour où nous é tions... Du coup, c’é tait à mon tour de raconter mes histoires... Je m’y suis mis tout doucement... Il a é couté tout du long...

« Ah! ben alors! Ah! ben mon petit pote! Ah ben ç a c’est carabiné !... Il en restait tout baba!... Ah ben dis donc c’est pas croyable... Ah ben alors, je m’é tonne plus que t’es gras comme un courant d’air!... Ah! vous avez dé rouillé !... Merde!... C’est une leç on! Tu vois mon petit pote!... C’est toujours comme ç a la campagne... Quand t’es de Paris, faut que t’y restes!... Souvent on m’a offert à moi des genres de petits dé positaires, des marques, des garages dans des bleds... C’é tait sé duisant à entendre. Des “ repré sentations ”, des vé los, en pneumatiques... Ton maî tre par-ci!... Liberté par-là !... Taratata! Moi jamais ils m’ont é tourdi!... Jamais! Ç a je peux le dire!... Tous les condé s de la campagne c’est des choses qu’il faut connaî tre!... Il faut ê tre né dans leurs vacheries... Toi te voilà qu’arrive fleur... Tu tombes dans la brousse! Imagine!... tout chaud, tout bouillant... Dè s la descente, ils te possè dent!... T’es l’œ uf!... Y a pas d’erreur!... Et tout le monde te croû te... Les jeux sont faits!... On se ré gale! Profits?... Balle-Peau!... T’en tires pas un croc pour ta pomme... T’es fait bonnard sur tout le parcours!... Comment que tu pourrais toi te dé fendre?... Tu ré sistes pas une seconde... Faut ê tre dans le jus dè s le biberon... Voilà l’idé al!... Autrement t’es bien fait cave à tous les dé tours!... Comment que tu pourrais é taler?... Ç a s’entrave pas dans un soupir! Ç a s’invente pas les artichauts!... T’as pas une chance sur cent dix mille... Et puis comme vous partiez vous autres?... Avec des cultures centrifuges... Ç a alors, c’é tait du nougat!... Vous la cherchiez bien la culbute... Vous vous ê tes fait retourner franco!... C’é tait dans la fouille!... Ah! Mais dis donc alors petit pote, ce que tu peux voir maigre! Mais c’est pas croyable!... T’aimes ç a la soupe au tapioca?... » Il trifouillait dans sa cuisine... Il devait ê tre au moins neuf heures... « Il va falloir que tu te rambines!... Ici tu vas te taper la cloche! Ç a je te garantis!... Il va falloir que tu m’en caches!... Ah! Y a pas d’erreur ni de chanson... » Il m’a rebiglé au tournant... le joli genre de mon costard... ç a le faisait un peu sourire... et ma combinaison-culotte... et les ficelles pour le fond...

« Tu peux pas rester en loques!... Je vais te chercher un petit grimpant... Attends... Je vais te trouver quelque chose... » Il m’a ramené d’à cô té, un complet tout entier à lui, de son armoire à coulisse... C’é tait en parfait é tat, et puis un manteau peau d’ours... un formidable poilu... « Tu mettras ç a en attendant!... » et une casquette à rabats et le caleç on et la liquette en flanelle... J’é tais resapé magnifique!

« T’as pas faim alors?... Du tout?... » J’aurais rien pu ingurgiter... Je me sentais mê me un malaise... quelque chose de bien pernicieux... J’avais les tripes en glouglous... sans charre, j’é tais pas fringant!

« Qu’est-ce que t’as alors mon petiot?... » Je commenç ais à l’inquié ter.

« J’ai rien!... J’ai rien!... » Je luttais...

« T’as attrapé froid alors?... Mais c’est la grippe qui te travaille!

— Oh! non... Je crois pas... que j’ai ré pondu... Mais si tu veux bien mon oncle, une fois que t’auras fini de manger... On pourra peut-ê tre faire un petit tour?...

— Ah! Tu crois que ç a va te dé gager?...

— Ah! Oui! mon oncle!... Oui, je crois!...

— T’as donc mal au cœ ur?...

— Oui! un tout petit peu, mon oncle!...

— Eh bien t’as raison!... Descendons tout de suite tiens!... Moi je mangerai plus tard!... Tu sais je suis un peu comme ta mè re... Subito! Presto! Y a jamais d’arê tes! » Il a pas terminé sa croû te... On est partis tout doucement jusqu’au coin du café de l’Avenue... Là, il a voulu qu’on s’assoye à la terrasse... et que je prenne une infusion de menthe... Il me causait encore de choses et d’autres... Je lui ai demandé un peu des nouvelles... Si il avait vu mes parents?...

« Au moment de partir en Belgique, ç a va faire deux mois hier!... J’ai fait un saut au Passage... Je les ai pas revus depuis!... Ils se retournaient bien les mé ninges, qu’il a ajouté, à propos de tes lettres! Ils les é pluchaient tu peux le dire... Ils savaient plus ce que tu devenais... Ta mè re voulait partir te voir tout de suite... Ah! Je l’ai dissuadé e... J’ai dit que j’avais moi des nouvelles... Que tu te dé brouillais parfaitement... mais que vous aviez pas une minute à cause des semailles! Enfin des bê tises!... Elle a remis le voyage à plus tard!... Ton pè re é tait encore malade... Il a manqué son bureau plusieurs fois de suite cet hiver... Ils avaient peur tous les deux que, cette fois-là, ç a soye la bonne... qu’ils attendent plus Lempreinte et l’autre... qu’ils le ré voquent... Mais ils l’ont repris en fin de compte... Par contre, ils y ont dé falqué inté gralement ses jours d’absence!... Imagine! Pour une maladie!... Pour une compagnie qui roule sur des cent millions! qu’a des immeubles presque partout! C’est pas une honte?... C’est pas effroyable?... D’abord tiens c’est bien exact... plus qu’ils sont lourds plus qu’ils en veulent... C’est insatiable voilà tout! C’est jamais assez!... Plus c’est l’opulence et tant plus c’est la charogne!... C’est terrible les compagnies!... Moi je vois bien dans mon petit truc... C’est des suceurs tous tant qu’ils sont!... des voraces! des vrais pompe-moelle!... Ah! C’est pas imaginable!... Parfaitement exact... Et puis c’est comme ç a qu’on devient riche... Que comme ç a!

— Oui mon oncle!...

— Celui qu’est malade peut crever!...

— Oui mon oncle!...

— C’est la vraie chanson finale, petit fias, faut apprendre tout ç a!... et immé diatement! tout de suite! Mé fie-toi des milliardaires!... Ah! Et puis j’oubliais de te dire... Y a encore quelque chose de nouveau... du cô té de leurs maladies... Ton pè re veut plus voir un mé decin!... Mê me Capron qu’é tait pas mauvais! et pas malhonnê te, en somme... Il poussait pas à la visite... Elle non plus ta mè re, elle veut plus en entendre parler... Elle se soigne complè tement elle-mê me... Et je te garantis qu’elle boite... Je sais pas comment qu’elle s’arrange... Des sinapismes! des sinapismes!... Toujours la mê me chose avec moutarde! sans moutarde! Chaud! froid! Chaud! froid! Et elle s’arrê te pas de travailler!... Et elle se dé manche!... Il faut qu’elle retrouve des clients!... Elle en a fait des nouveaux pour sa nouvelle Maison de Broderies... des dentelles bulgares... Tu te rends compte! Ton pè re bien sû r il en sait rien... Elle repré sente pour toute la Rive droite... Ç a lui fait des trottes... Si tu voyais sa figure quand elle rentre de ses tourné es... Ah! alors faut voir la mine!... C’est absolument incroyable!... J’aurais dit un vrai cadavre... Elle m’a mê me fait peur l’autre jour!... Je suis tombé dessus dans la rue... Elle rentrait avec ses cartons... Au moins vingt kilos j’en suis sû r! T’entends vingt kilos! À bout de poignes... C’est pesant toutes ces saloperies!... Elle m’a mê me pas aperç u!... C’est la fatigue qui la tuera... Tu t’en feras autant à toi-mê me si tu fais pas plus attention! Ç a je te dis mon pote! D’abord tu manges beaucoup trop vite... Tes parents te l’ont toujours dit... De ce cô té -là ils ont pas tort... »

Tout ç a c’é tait ma foi possible... Enfin c’é tait pas important... Enfin pas beaucoup... Je voulais pas du tout le contredire... Je voulais pas cré er de discussion... Ce qui me gê nait pendant qu’il me causait... que je l’é coutais mê me pas trè s bien... C’é tait la colique... Ç a m’ondoyait dans les tripes... Il continuait à me parler...

« Qu’est-ce que tu vas faire aprè s ç a?... T’as dé jà quelque chose en tê te?... Une fois que t’auras repris du lard?... » Lui aussi ç a le souciait un peu la question de mon avenir...

« Ah! mon petit pote! Tout ce que je t’en dis, c’est pas pour que tu te presses!... Oh! mais non!... Prends tout ton temps pour tes dé marches! Savoir d’abord où on se trouve!... Va pas piquer n’importe quoi!... Ç a te retomberait sur le râ ble!... Faut te retourner mais tout doucement... Faut faire attention!... Le travail c’est comme la croû te... Il faut que ç a profite d’abord... Ré flé chis! Estime! Demande-moi! Tâ te! Examine!... à droite, à gauche... Tu dé cides quand tu seras sû r!... À ce moment-là, tu me le diras... Y a pas la foire sur le pont... Pas encore... Hein?... Prends pas quelque chose au petit hasard... Tout juste pour me faire plaisir... Pas une bricole pour quinze jours!... Non!... Non!... T’es plus un gamin... Encore un condé à la gode... Tu finiras par te faire mal!... Tu te perdrais en ré putation. »

On est repartis vers chez lui... On a fait le tour du Luxembourg... Il reparlait encore d’un emploi... ç a le minait un peu comment j’allais me dé merder?... Il se demandait peut-ê tre en douce dans le tré fonds de sa gentillesse si j’en sortirais jamais de mes né fastes instincts... de mes dispositions bagnardes?... Je le laissais un peu mijoter... Je savais plus quoi lui dire... J’ai rien ré pondu tout de suite... J’avais vraiment trop de fatigue et puis un vilain mal aux tempes... Je l’é coutais que d’une oreille... Arrivé s au boulevard Raspail je pouvais mê me plus arquer droit... Je prenais le trottoir tout de traviole... Il s’est rendu compte... On a fait encore une halte... Je pensais tout à fait à autre chose... Je me reposais... Il me la cassait l’oncle É douard avec toutes ses perspectives... J’ai regardé encore en l’air... « Tu les connais toi, dis mon oncle, les “ Voiles de Vé nus ”... la “ Ruche des Filantes ”?... » Tout ç a sortait juste des nuages... c’é tait des poussiè res d’é toiles... « Et Amarine?... et Proliserpe?... je suis tombé dessus coup sur coup... la blanche et la rose... Tu veux pas que je te les montre?... » Il les avait sues l’oncle É douard, autrefois les constellations... Il savait mê me tout le grand Zé nith, un moment donné... du Triangle au Sagittaire, le Boré al presque par cœ ur!... Tout le « Flammarion » il l’avait su et forcé ment le « Pereires »!... Mais il avait tout oublié... Il se souvenait mê me plus d’une seule... Il trouvait mê me plus la « Balance »!

« Ah mon pauvre crapaud, à pré sent j’ai perdu mes yeux!... Je te crois sur parole! Regarde tout ç a à ma place!... Je peux mê me plus lire mon journal! Je deviens si myope ces jours-ci que je me tromperais d’astre à un mè tre! Je verrais plus le ciel si j’é tais dedans! Je prendrais bien le Soleil pour la Lune!... Ah! dis donc! » Il disait ç a en rigolade...

« Ah! Mais ç a fait rien... qu’il a ajouté... Je te trouve toi joliment savant! Ah mais t’es fortiche! T’en as fait dis donc des progrè s!... C’est pas de la piquette! T’as pas beaucoup briffé là -bas!... Mais t’as avalé des notions!... Tu t’es rempli de savoir-vivre!... Ah! T’es trapu mon petit pote!... Tu te l’es farcie ta grosse tê te!... Hein dis mon poulot? Mais c’est la science ma parole!... Ah! y a pas d’erreur!... » Ah! je le faisais rire... On a reparlé un peu de Courtial... Il a voulu un peu savoir à propos de la fin... Il m’a reposé quelques questions... Comment ç a s’é tait terminé ? Ah! Je pouvais plus tenir qu’il m’en cause!... Il m’en passait une panique... Une crise presque comme à la vieille... Je pouvais plus me retenir de chialer!... Merde!... Ç a faisait moche!... Ç a me secouait les os... Pourtant j’é tais dur!... C’é tait sû rement l’intense fatigue...

« Mais qu’est-ce que t’as! mon pauvre crabe!... Mais t’es tout dé fait! Mais voyons, il faut pas te frapper!... Ce que j’en disais tout à l’heure à propos de ta place, c’é tait seulement pour qu’on en cause... Je prenais pas ç a au sé rieux! Faut pas le prendre non plus! Tu vas pas quand mê me t’effarer pour des fariboles pareilles!... Tu me connais pourtant assez bien!... T’as pas confiance dans ton oncle?... Je disais pas ç a pour te chasser!... Voyons gros andouille! tu m’as pas compris?... Rentre-moi tout de suite ces pleurs! T’as l’air d’une mignarde à pré sent!... Hein mon petit boulot c’est fini?... Un homme ç a chiale pas!... Tu resteras tant qu’il faudra!... Là ! Voyons quand mê me!... Tu vas d’abord te remplumer... Je veux te voir rebouffi, rebondi! gavé ! gras du bide! On voudrait pas de toi n’importe où ! T’y penses pas! comme ç a?... Tu peux pas te dé fendre tel quel!... On prend pas les papiers mâ ché s! Faut ê tre maous sur la place! Tu leur fouteras tous sur la gueule... Baoum!... Renversez-moi tout ç a!... Un coup du droit! Bang! Un coup du gauche... Garç on! Monsieur? Un biscoto!... » Il me consolait comme il pouvait, mais j’arrivais pas à me tarir. Je tournais tout à fait en fontaine.

« Je veux m’en aller, mon oncle!... Je veux partir!... Je veux partir loin!...

— Comment t’en aller?... Partir où ?... En Chine?... Loin? Où ç a?...

— Je sais pas, mon oncle!... Je sais pas!... » Je dé goulinais de plus en plus fort... Je me suis relevé... J’é touffais!... Mais une fois debout j’ai tré buché... Il a fallu qu’il m’é taye... Quand on est arrivé s chez lui, il savait plus vraiment quoi faire!... Ni dire!...

« Eh bien, mon gros!... ben mon toto!... Faut oublier quand mê me tout ç a!... Mettons que j’ai rien dit du tout!... C’est pas de ta faute mon pauvre gniard! Allons! Tu y es pour rien!... Courtial, tu sais comment il é tait!... C’é tait un homme extraordinaire!... C’é tait un parfait savant!... Là je suis entiè rement d’accord!... Je l’ai toujours dit, tout le premier... Et je crois qu’il avait du cœ ur!... Mais c’é tait un homme d’aventure!... Extrê mement calé, c’est un fait! Extrê mement capable et tout!... et qu’a souffert mille injustices!... Oui! ç a c’est encore entendu!... Mais c’é tait pas la premiè re fois qu’il se promenait sur les pré cipices!... Ah! C’é tait un zè bre pour les risques!... Il les frisait les catastrophes!... D’abord les gens qui jouent aux courses? pas?... C’est qu’ils aiment se casser la gueule!.,. Ils peuvent pas se refaire!... Ç a on peut pas les empê cher... Il faut qu’ils arrivent au Malheur!... Dame! Trè s bien!... C’est le goû t du risque!... Ç a me fait bien de la peine quand mê me! Ah! Tu peux croire, ç a me touche beaucoup!... J’avais pour lui de l’admiration... Et mê me une sincè re amitié !... C’é tait un cerveau unique!... Ah! Je me rends bien compte! Une vé ritable valeur!... J’ai l’air bê te, mais je comprends bien... Seulement c’est pas une raison parce qu’il vient maintenant de mourir, pour toi en perdre le boire et le manger!... pour te dé charner jusqu’aux os!... Ah! ç a non alors! Par exemple! Ah! Nom de Dieu! Non!... Tu pourrais pas gagner ta vie dans l’é tat où tu te trouves!... C’est pas à ton â ge voyons qu’on se dé truit comme ç a la santé, parce qu’on est tombé sur un manche!... Tu vas pas remâ cher ç a toujours!... Mais t’as pas fini mon pote!... T’en verras bien d’autres, ma pauvre bouille!... Laisse les jé ré miades aux rombiè res!... Ç a les empê che pas de pisser!... Ç a leur fait un plaisir intense!... Mais toi t’es un mec à la redresse!... Pas que t’es à la redresse Routoutou?... Tu vas pas te noyer dans les pleurs?... Hi! Hi! Hi! Tu vois pas ç a dans la soupe?... » Il me donnait des toutes petites claques... Il essayait de me faire marrer!...

« Ah! le pauvre saule pleureur!... Il nous revient comme ç a de la campagne? Dé glingué !... Fondu!... Raplati!... Allons mon poulot!... Allons maintenant du courage!... Tiens, je te parlerai plus de t’en aller!... Tu vas rester avec moi!... Tu te placeras nulle part!... C’est conclu! C’est entendu!... Là, t’es plus tranquille?... Plus jamais tu te chercheras une place!... Là ! T’es content à pré sent?... Tiens, je vais te prendre moi, dans mon garage!... C’est peut-ê tre pas trè s excellent d’ê tre apprenti chez son oncle... Mais enfin tant pis!... La santé d’abord! Les usages, je m’en fous!... Le reste ç a s’arrange toujours! La santé ! voilà !... voilà !... Je te dresserai moi, tiens mon petit pote! Je veux que tu prennes d’abord de la panne!... Ah! Oui! Ç a te ronge toi de chercher des places... J’ai bien vu chez tes parents... T’as pas la faç on facile, t’as pas le tempé rament pour... Tu seras plus jamais contraint... puisque c’est ç a qui t’é pouvante!... Tu resteras toujours avec moi... Tu tireras plus les cordons... Tu ferais pas un bon placier... Ah ç a non! Hein? Je peux pas! Je peux pas mieux te dire!... T’aimes pas aller te pré senter?... Bien! C’est ç a qui te fout la pé toche?... Bon!

— Non, mon oncle! C’est pas tant ç a!... Mais je voudrais partir...

— Partir! Partir! Mais partir où ?... Mais ç a te turlupine, mon petit crabe!... Mais je te comprends plus du tout!... Tu veux retourner dans ton bled?... T’en veux pousser des carottes?

— Oh! Non! mon oncle... Ç a je veux pas!... Je voudrais m’engager...

— Une idé e qui te traverse toute cuite?... Oh! ben, alors! T’y vas rondement!... T’engager?... Où ?... Mais pour quoi faire?... T’as tout ton temps mon poulot!... Tu t’en iras avec ta classe! Qu’est-ce qui te pré cipite?... t’as la vocation militaire?... C’est marrant quand mê me!... » Il me considé rait avec soin... Il me retrouvait tout insolite... Il me dé visageait...

« Ç a c’est une lubie, mon lapin... Ç a te prend comme une envie de pisser!... Mais ç a te passera aussi de mê me!... Tu vas pas devenir comme Courtial? Tu veux tourner hurluberlu?... Ah! ben dis donc tes parents?... T’as pas ré flé chi un petit peu?... Comment qu’ils vont chanter alors? Ah! la sé ré nade! Ah! j’ai pas fini d’entendre! Ils diront que c’est moi le responsable!... Ah! Alors minute!... Que je t’ai foutu des drô les d’idé es! Que t’es sinoque comme ton dabe!... »

Il é tait pas content du tout... J’ai voulu tout lui avouer!... Comme ç a d’emblé e... N’importe quoi!... N’importe comment!...

« Mais je sais pas rien faire mon oncle... Je suis pas sé rieux... Je suis pas raisonnable...

— Mais si que t’es sé rieux ma grosse bouille! Moi je te connais bien... Mais si! que t’es raisonnable! »

J’en pouvais plus moi de chialer...

« Non! Je suis un farceur mon oncle!...

— Mais non! Mais non! mon poulot!... T’es un petit connard au contraire! T’es la bonne bouille que je te dis!... T’as pas un poil de rusé ! T’es bonnard à toutes les sauces!... Il t’a possé dé le vieux coquin! Tu vois donc pas vieux tré sor? C’est ç a que tu peux pas digé rer!... Il t’a fait!

— Ah! non! Ah! non!... » J’é tais hanté... Je voulais pas des explications. J’ai supplié pour qu’il m’é coute... « Je faisais que de la peine à tout le monde! » Je lui ai dit et ré pé té... Ah! Et puis j’avais mal au cœ ur!... Et puis je lui ai reparlé encore... toujours je ferais de la peine à tout le monde!... C’é tait ma terrible é vidence!...

« T’as bien ré flé chi?...

— Oui mon oncle!... Oui, je te jure, j’ai bien ré flé chi!... Je veux m’en aller!... demain... dis... demain...

— Ah! Mais la maison brû le pas!... Ah ç a non!... repose-toi encore! On part pas comme ç a!... En coup de tê te... On contracte pas pour un jour!... C’est pour trois anné es mon ami!... C’est pour mille quatre-vingt-cinq jours... et puis les rabiots!...

— Oui, mon oncle...

— T’es pas si mé chant voyons!... Personne te repousse?... Personne t’accuse!... Ici, t’es pas mal quand mê me?... Je t’ai jamais brutalisé ?...

— C’est moi mon oncle qu’est mé chant... Je suis pas sé rieux. Tu sais pas mon oncle!... Tu sais pas!...

— Ah mais ç a te reprend! Mais c’est une manie, mon pauvre bougre!... que tu te tracasses à ce degré -là !... Mais tu vas te rendre vraiment malade...

— J’y tiens plus mon oncle!... J’y tiens plus!... J’ai l’â ge mon oncle!... Je veux partir!... J’irai demain mon oncle!... Tu veux bien?...

— Pas demain mon pote! Pas demain! Tout de suite! Tiens! Tout de suite! » Il s’é nervait... « Ah! ce que t’es tê tu quand mê me! Mais tu vas attendre une quinzaine! Et puis mê me un mois! Deux semaines pour me faire plaisir! On verra... d’ailleurs ils voudraient jamais de toi, tel quel!... Ç a je peux te le jurer à l’avance... Tu ferais peur à tous les majors!... Il faut d’abord que tu te rebectes! Ç a c’est l’essentiel!... Ils te videraient comme un malpropre!... T’imagines?... Ils prennent pas les soldats squelettes!... Il faut que tu te rempiffes en kilos!... Dix au moins! t’entends?... Ç a je t’assure!... Dix pour commencer!... Autrement! Barca!... Tu veux aller à la guerre?... Ah! mais! Ah! mais! Tu tiendrais comme un fé tu!... Qui c’est qui m’a flanqué un zouave qu’est gros comme un souffle... Allons! Allons! à plus tard!... Allez! Chè re é pingle! rentre-moi donc ces soupirs!... Ah! ben! Ils auraient de quoi rire!... Ils s’emmerderaient pas au Conseil de te voir en peau et en os!... Et au corps de garde?... Ah! ç a serait la crise! Salut soldat Pleurnichon!... T’aimes pas mieux “ sapeur ”?... Où ç a que tu vas t’engager?... T’en sais rien encore?... Alors comment que tu te dé cides?... »

Ç a m’é tait bien é gal en fait...

« Je sais pas mon oncle!...

— Tu sais rien!... Tu sais jamais rien!...

— Je t’aime bien mon oncle, tu sais!... Mais je peux plus rester!... Je peux plus!... T’es bien bon toi, avec moi!... Je mé rite pas mon oncle! Je mé rite pas!...

— Pourquoi ç a que tu mé rites pas?... dis petit con?...

— Je sais pas mon oncle!... Je te fais du chagrin aussi!... Je veux partir mon oncle!... Je veux aller m’engager demain.

— Ah! ben alors c’est entendu!... J’accepte! Ç a va! C’est conclu! Mais ç a nous dit toujours pas quel ré giment que t’as choisi?... Ah! mais c’est que t’as juste le temps!... » Il se moquait de moi dans la combine.

« Tu veux pas aller dans la “ griffe ”?... T’es pour la “ Reine des Batailles ”?... Non?... Je vois ç a!... Tu veux rien porter!... Les trente-deux kilos?... Tu voudrais mon fiotte! tu voudrais qu’on te porte! Dissimulez-vous Nom de Dieu!... T’en pinces pas?... Sous le fumier là qu’est à gauche!... Au dé filé ! Un! deux! un! deux!... T’en veux pas des belles manœ uvres?... Ah! Ah! mon lascar!... Utilisez donc votre terrain!... Tu dois ê tre calé dedans?... T’en as assez vu des terrains?... Tu sais maintenant comment c’est fait?... Les poireaux? la cafouine autour?... Hein?... Mais t’aimais mieux les é toiles!... Ah! Tu changes d’avis?... T’es pas long!... Astronome alors?... Astronome!... T’iras au “ 1er Té lescope ”! Ré giment de la Lune!... Non? Tu veux rien de ce que je te pré sente?... T’es pas facile à contenter! Je vois que t’aimes mieux la “ griffe ” quand mê me!... T’es-t’y bon marcheur?... T’en auras des cloques mon jé sus!... “ Les godillots sont lourds dans le sac! les godillots!... ” T’aimes mieux des furoncles aux fesses?... Alors bon! dans la cavalerie!... En fourrageur! Nom de Dieu!... Dans les petits matafs ç a te dit rien?...

Y a de la goutte à boire là -haut!

Y a de la goutte à boire!... »

Il faisait le clairon avec sa bouche: « Ta ra ta ta ta! Ta ta ta!...

— Ah! Pas ç a mon oncle!... Pas ç a!... » Il me rappelait l’autre numé ro.

« Comme t’es sensible, ma pauvre bouille!... Comment que tu feras bien dans la vache bataille?... Attends!... T’as pas tout ré flé chi?... Reste là ! T’as encore cinq minutes!... Reste avec moi encore un peu... Une affaire de deux, trois semaines!... Le temps que ç a se dessine!... Tiens mettons un mois!...

— Non mon oncle!... J’aime mieux tout de suite...



  

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