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Dix commandements pour l’après-catastrophe



Dix commandements pour l’aprè s-catastrophe

 

 

Publié le 16/12/2009 - 15: 29

L’impressionnant mé galithe é rigé il y a trente ans dans le sud des Etats-Unis n’a toujours pas ré vé lé son mystè re. Qui en est le commanditaire, et quelle est sa finalité ?

OS SERVIC

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Le monument le plus é trange des Etats-Unis se dresse dans le nord-est de la Gé orgie, sur un tertre dé ­so­lé. Cinq imposants blocs de granit poli dessinant une é toile s’é lè vent vers le ciel. Lorsqu’on s’approche de cette construction, on pense immé diatement au site mé galithique de Stonehenge, en Grande-Bretagne, ou encore à l’inquié tant monolithe du film 2001: l’Odyssé e de l’espace. Erigé s en 1980, ces blocs gris pâ le attendent paisiblement la fin du monde.

Les Georgia Guidestones [litté ralement, “Pierres directrices de Gé orgie”], comme on les appelle, sont un mystè re: personne ne sait qui a commandé l’ouvrage ni pourquoi. Les seules indications sur son origine sont une plaque placé e à proximité sur le sol (elle en pré cise les dimensions et explique le sens d’une sé rie d’entailles et d’orifices correspondant aux mouvements du soleil et des é toiles) et des instructions gravé es directement dans le roc. Ces instructions sont donné es en huit langues et té moignent d’une singuliè re idé ologie new age. Certaines sont vaguement eugé nistes (“Orientez sagement la reproduction – de faç on à amé liorer la santé et la diversité ”), d’autres prô nent un mysticisme hippie bon teint (“Appré ciez la vé rité – la beauté – l’amour – en cherchant l’harmonie avec l’infini”).
Les Guidestones, pense-t-on le plus souvent, sont censé es indiquer aux survivants d’une prochaine apocalypse la marche à suivre pour tenter de reconstituer la civilisation. Mais cette idé e n’est pas du goû t de tous. Quelques jours avant mon passage, le monument avait é té barbouillé de peinture, et des slogans du genre “Mort au nouvel ordre mondial” y avaient é té tagué s à la bombe. C’est le premier acte de vandalisme grave de l’histoire des Guidestones, mais pas la premiè re manifestation d’hostilité à leur é gard. Depuis plus de trente ans, cette é trange structure é rigé e en pleine Bible Belt [“ceinture de la Bible”, nom donné aux Etats du sud-est des Etats-Unis, où l’on trouve une forte proportion de chré tiens fondamentalistes] suscite des ré actions qui vont de l’é merveillement à l’horreur. Ses partisans (parmi lesquels Yoko Ono) louent ses messages comme autant d’appels au rationalisme, quand ses dé tracteurs y voient les dix commandements de l’Anté christ.

Quels que soient les maî tres d’ouvrage des Guidestones, ils savaient ce qu’ils faisaient: il s’agit d’une structure savamment conç ue, qui suit le soleil à la perfection. Et qui, grâ ce à une aura de mystè re soigneusement entretenue, exerce une fascination infinie.
L’histoire des Georgia Guidestones dé bute un vendredi aprè s-midi de juin 1979: un é lé gant monsieur aux cheveux gris se rend au siè ge de l’entreprise de taille de granit Elberton Granite Finishing, où il se pré sente comme Robert C. Christian. Il dit repré senter “un petit groupe de bons Amé ricains” qui projette la cré ation d’un monument d’une dimension et d’une complexité inhabituelles. Si Robert C. Christian est venu à Elberton, la capitale mondiale du granit, c’est qu’il est convaincu que les carriè res de la ré gion produisent la plus belle pierre du monde.

“J’ai un timbré ici qui veut un monument insensé ”

Joe Fendley, directeur gé né ral d’Elberton Granite, hoche la tê te d’un air absent. Mais, quand Christian commence à lui dé crire ce qu’il en a tê te, il interrompt ce qu’il est en train de faire. Car non seulement son visiteur demande des pierres comme on n’en a jamais extraites dans le comté, mais il veut aussi qu’elles soient taillé es, polies et assemblé es de faç on à former une sorte de gigantesque instrument astronomique.

Mais dans quel but? s’enquiert Fendley. Robert C. Christian explique que la structure qu’il envisage servira de boussole, de calendrier et d’horloge. Il faudra aussi qu’on y grave un ensemble d’instructions dans huit des langues les plus parlé es au monde. Et elle doit pouvoir ré sister aux pires catastrophes, afin qu’une humanité dé cimé e puisse se servir de ces directives pour rebâ tir une civilisation meilleure que celle qui est en passe de s’autodé truire.

Fendley est aujourd’hui dé cé dé, mais un journaliste d’une chaî ne de té lé vision d’Atlanta avait pu recueillir son té moignage peu aprè s l’é dification des Guidestones. “Je me suis dit: ‘J’ai affaire à un cinglé. Comment le mettre dehors? ’” Le chef d’entreprise tente alors de dé courager son visiteur en lui donnant un prix plusieurs fois supé rieur à celui de tous les chantiers ré alisé s par son entreprise. Il faut des outils spé ciaux, du maté riel lourd, et faire appel à des consultants exté rieurs, justifie-t-il. Mais Robert C. Christian se contente de hocher la tê te et s’enquiert de la duré e du chantier. Six mois au moins, hasarde Fendley. De toute faç on, ajoute-t-il, ne serait-ce que pour é tudier un projet de cette envergure, il lui faut des garanties financiè res. Lorsque Christian lui demande s’il y a en ville un banquier ayant sa confiance, Fendley voit là l’occasion de se dé ­barrasser de l’importun: il l’envoie chez Wyatt Martin, le directeur de la Granite City Bank.

Wyatt Martin (seule personne à Elberton, avec Fendley, à avoir rencontré R. C. Christian) est aujourd’hui â gé de 78 ans. “Fendley m’a appelé et m’a dit: ‘J’ai un timbré ici qui veut un monument insensé. ’ Mais, quand j’ai vu le gars arriver, il portait un costume trè s é lé gant, trè s cher, ce qui m’a incité à le prendre un peu plus au sé rieux. Et puis, il s’exprimait bien, c’é tait visiblement quelqu’un d’un certain niveau. ” Naturellement, Wyatt Martin est surpris quand l’homme lui annonce que “R. C. Christian” est un pseudonyme. Son groupe nourrit ce projet en secret depuis vingt ans, explique-t-il, et il souhaite conserver à jamais l’anonymat. “Quand il m’a raconté leur projet, j’ai failli tomber à la renverse, se souvient Wyatt Martin. Je lui ai dit: ‘Autant jeter l’argent par les fenê tres. ’ Il m’a simplement regardé en secouant la tê te, comme s’il avait un peu pitié de moi, et a dit: ‘Vous ne comprenez pas. ’”

Wyatt Martin conduit Christian sur la place de la localité, où trô ne une imposante fontaine du Bicentenaire [de l’indé pendance des Etats-Unis] commandé e par la municipalité, dont les treize panneaux de granit, disposé s en cercle, repré sentent les treize colonies originelles. “Je lui ai dit que c’é tait le projet le plus important jamais entrepris dans le coin et que c’é tait sans commune mesure avec ce dont il parlait. Cela n’a pas semblé le dé ranger. ” Christian promet de revenir le lundi suivant; il affrè te un avion et passe le week-end à faire du repé rage depuis les airs. “A partir de là, j’ai commencé à le croire à moitié ”, se rappelle Wyatt Martin.

Quand Christian se pré sente à nouveau à la banque le lundi, le banquier lui explique qu’il ne peut pas lancer la procé dure sans connaî tre sa vé ritable identité et obtenir la garantie qu’il est solvable. Les deux hommes aboutissent finalement à un accord: Christian lui ré vé lera son vrai nom à condition que Wyatt s’engage à ê tre son seul intermé diaire, à signer un accord de confidentialité en vertu duquel il ne dé voilera jamais l’information à â me qui vive et il dé truira l’ensemble des documents et archives une fois le chantier terminé. “Il m’a pré cisé qu’il virerait la somme depuis diffé rentes banques dans le pays, raconte Wyatt Martin. Il m’a bien fait comprendre qu’il ne prenait pas à la lé gè re la question du secret. ”

Avant de quitter Elberton, Christian rencontre à nouveau Fendley, à qui il remet une boî te à chaussures contenant une maquette en bois du monument souhaité, accompagné e d’un cahier des charges d’une bonne dizaine de pages. Fendley accepte la maquette et le document, mais il est encore sceptique. Le vendredi suivant, Wyatt Martin lui annonce par té lé phone qu’il vient de recevoir un virement de 10 000 dollars. Dè s lors, l’entrepreneur se met au travail et ne posera plus de questions. “Mon pè re adorait les dé fis”, se souvient sa fille, Melissa Fendley Caruso. “Il disait que c’é tait le projet le plus ambitieux de l’histoire du comté d’Elbert. ”

La construction des Guidestones commence un peu plus tard cet é té -là. Joe Fendley et Wyatt Martin ont aidé Christian à trouver un site adé quat dans le comté d’Elbert: une butte surplombant les pâ turages d’une vaste exploitation agricole, avec un panorama à 360 degré s. Pour 5 000 dollars, son proprié taire, Wayne Mullinex, cè de une parcelle d’un peu plus de 2 hectares. En sus de l’argent, Christian octroie à Mullinex et à ses enfants un droit de pâ turage à vie pour le bé tail, et l’entreprise de BTP de Mullinex se charge de ré aliser les fondations du monument.

Une fois le terrain acheté, l’avenir des Guides­tones est assuré. Christian prend congé de Fendley. “Vous ne me reverrez plus jamais”, dit-il avant de sortir, sans mê me une poigné e de main. Dè s lors, Christian ne communiquera plus qu’avec Wyatt Martin. Il lui é crit quelques semaines plus tard pour lui demander de transfé rer la proprié té du terrain et du monument au comté d’Elbert, qui en est encore aujourd’hui le proprié taire: le mysté rieux maî tre d’ouvrage pense que la fierté des administré s se chargera avec le temps de proté ger les Guidestones. “Les lettres de M. Christian provenaient à chaque fois de villes diffé rentes, raconte Martin. Il n’a jamais posté un courrier deux fois du mê me endroit. ”

Les spé cifications astronomiques pour les Guidestones sont si complexes que Fendley doit s’assurer les services d’un astronome de l’université de Gé orgie. Les quatre pierres exté rieures doivent ê tre orienté es en fonction de la course annuelle du soleil. Sur la colonne centrale, deux é lé ments né cessitent un calibrage minutieux: une ouverture à travers laquelle l’é toile polaire sera visible en permanence, et une fente devant s’aligner sur la position du soleil levant les jours de solstice et d’é quinoxe. La pierre faî tiè re, elle, se caracté rise par un orifice de 2 centimè tres par lequel un rayon de soleil doit passer chaque jour à midi et tomber sur la date du jour indiqué e sur la pierre centrale.

La particularité la plus remarquable du monument reste né anmoins ses dix pré ceptes gravé s sur les deux faces des pierres exté rieures en huit langues: anglais, espagnol, russe, chinois, arabe, hé breu, hindi et swahili. Une sorte d’é noncé de mission (“Que ces pierres nous guident vers un â ge de la raison”) doit par ailleurs ê tre gravé sur les cô té s de la pierre faî tiè re en hié roglyphes é gyptiens, en grec ancien, en sanskrit et en caractè res cuné iformes babyloniens. Les traductions, fournies pour certaines par les Nations unies (notamment pour les langues mortes), sont inscrites au pochoir sur la pierre, puis gravé es à la sableuse.
L’artisan a é té distrait par une musique é trange et des voix confuses

Le monument suscitera la controverse avant mê me d’ê tre achevé. La premiè re rumeur est colporté e par les membres de l’Association des industriels du granit d’Elberton, jaloux de l’attention dont bé né ficie un des leurs: c’est Joe Fendley qui est derriè re tout cela, assurent-ils, avec la complicité de son ami le banquier Wyatt Martin. Les ragots se font si pernicieux que les deux hommes acceptent de se soumettre au dé tecteur de mensonges. La rumeur faiblit lorsque le journal local, The Elberton Star, rapporte qu’ils ont tous deux passé le test avec succè s, mais cette mé diatisation suscite de nouveaux griefs. Quand la teneur des inscriptions commence à se ré pandre, se souvient Wyatt Martin, mê me des gens qu’il considè re comme ses amis lui demandent pourquoi il a accepté d’exé cuter l’œ uvre du Malin. James Travenstead, un pasteur de la ré gion, pré dit que des “groupes occultes” vont affluer et met en garde: “Un jour, un sacrifice aura lieu ici. ” Quant à ceux qui sont plutô t pour le projet, ils sont refroidis par les propos de Charlie Clamp, l’artisan chargé de graver les caractè res sur les pierres: il y a passé des heures, raconte-t-il, et a constamment é té distrait de sa tâ che par “une musique é trange et des voix confuses”.
L’inauguration, le 22 mars 1980, est une fê te pour toute la ville. Le dé puté de la circonscription, Doug Barnard, s’exprime devant 400 personnes qui ont afflué sur la colline, notamment des é quipes de té lé vision venues d’Atlanta. Elberton ne tarde pas à devenir une destination touristique, et l’on vient du monde entier pour voir les Guidestones. “Nous avons eu des visiteurs du Japon, de Chine, d’Inde, d’un peu partout, qui voulaient monter voir le monument”, raconte Wyatt Martin. Au printemps 2005, la revue National Geographic Traveler mentionne les Georgia Guidestones dans son guide des Appalaches.

“Gouvernez toutes choses par la raison et la modé ration”

Mais les inscriptions sur les pierres per­turbent plus d’un visiteur. Le pré cepte numé ro 1 jette d’emblé e un froid: “Maintenez l’humanité sous la barre des 500 millions d’individus en é quilibre constant avec la nature. ” La planè te compte à l’é poque 4, 5 milliards d’ê tres humains, ce qui signifie qu’il faut en faire disparaî tre 8 sur 9 (aujourd’hui, ce serait de l’ordre de 12 sur 13). Et cette instruction est rappelé e et dé veloppé e dans le pré cepte numé ro 2: “Orientez sagement la reproduction – de faç on à amé liorer la santé et la diversité. ” Pas besoin d’ê tre particuliè rement imaginatif pour faire le parallè le avec les pratiques eugé nistes des nazis, entre autres. L’instruction numé ro 3 enjoint à l’humanité de s’unir derriè re une nouvelle langue vivante: voilà qui fait frissonner les pasteurs de la ré gion, qui savent bien que, d’aprè s l’Apocalypse, une langue commune et un gouvernement mondial font partie des ré alisations de l’Anté christ.

Le pré cepte numé ro 4 (“Gouvernez la passion – la foi – la tradition – et toutes choses par la modé ration et la raison”) est tout aussi dé plaisant pour les chré tiens attaché s à la primauté absolue de la foi. En comparaison, les six autres sont simplement d’un moralisme ennuyeux: “Proté gez les peuples et les nations par des lois é quitables et des tribunaux justes. Que toutes les nations se gouvernent elles-mê mes et ré solvent les conflits externes devant un tribunal mondial. Evitez les lois mesquines et les fonctionnaires inutiles. Maintenez l’é quilibre entre droits individuels et devoirs sociaux. Appré ciez la vé rité – la beauté – l’amour – en cherchant l’harmonie avec l’infini. Ne soyez pas un cancer pour la Terre – laissez de la place à la nature – laissez de la place à la nature. ”

Alors que les habitants s’interrogent sur la validité de ces commandements, les sombres pré dictions du pasteur Travenstead semblent se vé rifier. Un groupe de sorciè res d’Atlanta organise des sabbats le week-end au pied des Guidestones pour y pratiquer divers rituels paï ens (“des danses, des chants, ce genre de choses”, pré cise Wyatt Martin) et mê me, en une occasion, une cé ré monie de mariage entre sorciers. Aucun ê tre humain n’est sacrifié sur l’autel de granit, mais le bruit court que des poulets y sont dé capité s.

Un membre haut placé d’une “socié té secrè te lucifé rienne”

Les visiteurs continuent d’affluer, mais, aprè s plusieurs enquê tes infructueuses sur la vé ritable identité de R. C. Christian, les mé dias finissent par se dé sinté resser du lieu. Un regain de curiosité a lieu en 1993, au moment où Yoko Ono enregistre pour un album en hommage au compositeur d’avant-garde John Cage un morceau intitulé Georgia Stone, dans lequel elle scande presque mot pour mot le dixiè me et dernier pré cepte: “Ne soyez pas un cancer pour la Terre – laissez de la place à la nature – laissez de la place à la nature. ” Pendant tout ce temps, Robert C. Christian est resté en contact avec Wyatt Martin, tant et si bien qu’entre les deux hommes est né e une vé ritable amitié é pistolaire.

Le mystè re Robert C. Christian et l’absence d’information sur la vé ritable signification des Guidestones ont naturellement enflammé les thé oriciens du complot et les “enquê teurs” en tout genre. Pas é tonnant que, trente ans plus tard, les curieux se pressent encore devant le monument pour tenter de combler le vide par des hypothè ses diverses et varié es.

Parmi eux se trouve Mark Dice, auteur d’un ouvrage intitulé The Resistance Manifesto [Le manifeste de la ré sistance]. Depuis 2005, cet homme exige que les Guidestones soient “brisé es en des millions de morceaux”. Selon lui, le monument a “une origine satanique profonde”, affirmation qui lui a valu l’attention des mé dias. R. C. Christian, assure-t-il, é tait un membre haut placé d’une “socié té secrè te lucifé rienne”, fer de lance du nouvel ordre mondial. “L’é lite planche sur la mise au point dans les dé cennies à venir de technologies de prolongement de la vie qui mettront fin au vieillissement, affirme Mark Dice, et elle craint qu’avec une planè te aussi densé ment peuplé e qu’aujourd’hui les masses n’utilisent les ressources qu’elle veut se ré server pour elle-mê me. Les Guide­s­tones sont les dix commandements du nouvel ordre mondial. Elles sont aussi un moyen pour l’é lite de rire aux dé pens des masses non informé es: leur projet est clair comme de l’eau de roche, et ces zombies ne s’en rendent mê me pas compte. ”

L’interpré tation de Mark Dice n’a fait qu’accroî tre l’inté rê t pour les Georgia Guidestones. Et attirer de nouveaux visiteurs, dissuadant d’autant plus les responsables du comté d’Elbert de se dé barrasser du seul grand atout touristique de leur ré gion. Phyllis Brooks, qui dirige la chambre de commerce du comté, s’est dit horrifié e quand, en novembre dernier, les Guide­stones ont é té vandalisé es pour la premiè re fois de leur histoire. Si Mark Dice nie ê tre impliqué dans l’affaire, il semble bien en ê tre l’inspirateur: les messages bombé s au spray sur la pierre disaient “Jé sus vous vaincra, sales satanistes” ou “Non au gouvernement mondial”. D’autres tags clamaient que les attentats du 11 septembre 2001 é taient l’œ uvre du gouvernement amé ricain et que Barack Obama é tait musulman.

Wyatt Martin grimace chaque fois qu’il entend Dice parler de “socié té secrè te lucifé rienne” à propos des Guidestones. Bien qu’en dé saccord, il reconnaî t n’avoir aucune certitude. “Tout ce que je peux vous dire, c’est que M. Christian m’a toujours paru ê tre un gars trè s correct et trè s honnê te. ”

Naturellement, Mark Dice est loin d’ê tre le seul à avoir sa thé orie sur les Guidestones. Jay Weidner, ancien animateur radio à Seattle devenu expert en thé ories du complot, a consacré un temps et une é nergie considé rables à é chafauder l’une des hypothè ses les plus prisé es. Pour lui, Christian et ses associé s é taient des rosicruciens, des membres de l’ordre mystique de la Rose-Croix, une socié té secrè te apparue dans l’Allemagne du bas Moyen Age qui affirmait connaî tre sur la nature, l’univers et la spiritualité des vé rité s é soté riques é chappant au commun des mortels. Le nom de R. C. Christian, avance Jay Weidner, est un hommage à Christian Rosenkreutz, le personnage mythique censé ê tre le fondateur lé gendaire de la Rose-Croix au xive siè cle. Le culte du secret, poursuit-il, a toujours caracté risé les rosicruciens, qui se sont fait connaî tre au dé but du xviie siè cle par deux manifestes anonymes qui firent sensation dans toute l’Europe, mê me si personne n’a jamais pu identifier un seul membre de cette socié té secrè te. De fait, si les pré ceptes gravé s sur les Guide­stones sont en contradiction flagrante avec l’eschatologie chré tienne, ils collent assez bien aux principes de la Rose-Croix, qui mettent l’accent sur la raison et prô nent l’harmonie avec la nature.

“Je ne peux rien dire, j’ai fait une promesse”

Jay Weidner a é galement une thé orie sur la raison d’ê tre des Guidestones. Spé cialiste des traditions hermé tistes et alchimiques qui donnè rent naissance à la Rose-Croix, il est convaincu que, depuis des gé né rations, l’Ordre transmet la connaissance d’un cycle solaire culminant tous les treize mille ans. Lors de cet apogé e cyclique, de gigantesques é jections de masse coronale devraient dé vaster la Terre. En attendant, estime Weidner, l’organisation secrè te à l’origine des Guidestones orchestre un “chaos plané taire” qui a dé buté avec le ré cent effondrement du systè me financier amé ricain et se traduira à terme par de graves perturbations de l’approvisionnement en pé trole et en produits alimentaires, des é meutes à grande é chelle et des guerres ethniques dans le monde entier, qui aboutiront au 21 dé cembre 2012 – le Grand Evé nement. “Ils veulent faire dé croî tre la population, assure Jay Weidner, et c’est ainsi qu’ils pensent y parvenir. Les Guidestones sont là pour instruire les survivants. ”

Informé des idé es de Weidner, Wyatt Martin secoue la tê te: c’est “le genre de chose qui me donne envie de dire tout ce que je sais”. Le banquier a depuis longtemps pris sa retraite et ne vit plus à Elberton, mais il reste le gardien officiel (et unique) du secret des Guidestones. “Mais je ne peux rien dire”, s’empresse d’ajouter le vieux monsieur. “J’ai fait une promesse. ” Wyatt Martin s’est aussi engagé à dé truire toutes les traces de ses tractations avec Robert C. Christian – mais cette promesse-là, il ne l’a pas tenue, pas encore. Au fond de son garage, une grande caisse en plastique (la valise capitonné e d’un ordinateur IBM qu’il a acheté en 1983) contient tous les documents lié s aux Guidestones qui sont passé s entre ses mains, y compris les lettres de Christian.

Pendant des anné es, Wyatt Martin a pensé qu’il é crirait peut-ê tre un livre, mais il sait aujourd’hui qu’il ne le fera pas. Pas plus qu’il ne m’autorisera à jeter un œ il à ses archives. Quand je lui demande s’il est prê t à emporter ce qu’il sait dans la tombe, il ré pond que c’est exactement ce que Christian souhaitait qu’il fasse. “Il n’a jamais cessé de dire que son identité et son origine devaient rester secrè tes. Il disait que c’est ainsi que fonctionnent les mystè res. Pour garder l’inté rê t des gens, il faut leur en ré vé ler trè s peu. ”

Randall Sullivan

 



  

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